Quatre ans après la pose de la première pierre, le célèbre musée Whitney de New York ouvre le 1er mai au public dans un nouveau quartier et un bâtiment flambant neuf, conçu par l'architecte italien Renzo Piano. Durée: 01:00
Le nouveau musée Whitney ouvre à New York
Paparazzi agressé à Miami: Justin Bieber passe un accord
Justin Bieber a passé un accord à l'amiable avec un photographe qui affirmait avoir été agressé par un des gardes du corps de la star, a indiqué vendredi un avocat du chanteur canadien. L'accord, dont les termes sont confidentiels, met fin aux poursuites.
Le paparazzi avait porté plainte contre Justin Bieber en 2013. Il accusait le chanteur de 21 ans d'avoir ordonné à l'un de ses gardes du corps de l'agresser alors qu'il tentait de prendre en photographie la star sur la plage à Miami Beach.
Le photographe affirmait que le garde du corps l'avait menacé avec un pistolet et avait enlevé la carte mémoire de sa caméra.
L'idole des jeunes a déjà eu de nombreux démêlés avec la justice: saccage d'une chambre d'hôtel et accusation de vandalisme à Rio de Janeiro en novembre 2013, agression d'un chauffeur de limousine en décembre 2013 à Toronto, conduite dangereuse au volant d'un bolide en Floride en janvier 2014, altercation après un accident de quad en août 2014 en compagnie de sa petite amie, la chanteuse Selena Gomez...
La réplique de la Grotte Chauvet a ouvert ses portes au public
La réplique de la Grotte Chauvet, riche de dessins rupestres vieux de 36'000 ans, a accueilli samedi matin ses premiers visiteurs, à Vallon-Pont-d'Arc, en Ardèche. Toutes les places pour la journée étaient déjà vendues à l'avance.
"On attend entre 2500 et 3000 visiteurs qui ont tous réservé à l'avance leurs billets sur Internet", a déclaré le directeur d'exploitation du site, Antoine Deudon. Plus de 70'000 billets ont été vendus à ce jour à l'avance sur Internet.
Inaugurée par le Président de la République François Hollande le 10 avril dernier, la "Caverne du Pont d'Arc" est située à près d'un kilomètre à vol d'oiseau de la grotte originelle. Celle-ci a été découverte le 18 décembre 1994 par un trio de spéléologues amateurs: Jean-Marie Chauvet, Eliette Brunel et Christian Hillaire.
Inscrite depuis juin dernier au patrimoine mondial de l'Unesco, la grotte originelle demeure fermée au public pour préserver le trésor qu'elle recèle. Le monumental espace de restitution a la forme d'une patte d'ours. Il permet au visiteur de découvrir un bestiaire exceptionnel, au réalisme confondant.
Au total, 1000 dessins dont 425 figures animales de 14 espèces différentes, (ours des cavernes, rhinocéros laineux, félins, panthère, hibou...), ont été reproduits au charbon de bois, comme le faisait l'Aurignacien lorsqu'il dessinait sur la paroi.
A Séville, flamenco et chevaux ouvrent la "Feria de Abril"
Peint en blanc jusqu'aux palmiers, un motel fait sensation
Un motel désaffecté repeint en blanc et transformé en sculpture géante sur laquelle chacun peut projeter ses pensées, ses désirs. C'est le pari réussi du Français Vincent Lamouroux qui crée l'événement à Los Angeles avec son oeuvre "Projections".
Plusieurs centaines de personnes ont assisté dimanche à l'inauguration de "Projections" sur Sunset Boulevard, à l'angle de Bates Avenue, d'où le surnom de "Bates Motel" de l'hôtel désaffecté depuis plus de dix ans.
Une foule d'artistes, de branchés, de familles avec enfants dans les bras se prenaient en photographie devant le "Pacific Sunset Motel", dont même le grillage, l'herbe ou les palmiers ont été passés à la chaux.
"L'idée, c'était de transformer intégralement le bâtiment et de l'envisager comme une grande sculpture à l'échelle de l'environnement urbain", a expliqué Vincent Lamouroux.
Il a choisi la couleur blanche, car c'est celle "qui pouvait amener le plus de lumière, qui pouvait éventuellement provoquer une espèce d'aveuglement. Cela amenait aussi quelque chose de plutôt positif et peut-être l'idée d'un écran de projection pour tous les désirs, toutes les envies, toute l'imagination".
L'installation va être maintenue en l'état pendant deux semaines avant de laisser le temps, la poussière et les artistes de rue en reprendre possession.
"Cela pourra être une proie facile et même une proie rêvée pour l'ensemble des tagueurs et des artistes de rue. On a mis en place un système de gardiennage pour 15 jours (...) puis on rend l'immeuble à l'espace public et advienne que pourra."
Russie: la guerre de l'information est déclarée
Dans cette "usine à trolls" de St-Pétersbourg, ils sont des centaines à scruter internet et à écrire des commentaires pour orienter les débats et les blogs en faveur du pouvoir russe. Depuis le début de la crise en Ukraine, la guerre ne se joue plus seulement sur le terrain. La guerre de l'information a aussi été déclarée. Durée: 03:52
L'actrice Salma Hayek présente son film "Le Prophète"à Beyrouth
L’actrice et réalisatrice mexicaine Salma Hayek était à Beyrouth lundi pour présenter le film qu’elle a produit, "Le Prophète", tiré de l’œuvre de l'auteur libanais Gibran Khalil Gibran. Durée:00:54
Salma Hayek lance "Le Prophète" au Liban
La star d'Hollywood Salma Hayek a présenté lundi dans le pays de ses ancêtres, le Liban, en première mondiale, son film d'animation "Le Prophète", adaptation de l'une des oeuvres les plus célèbres au monde, écrite par le Libanais Gibran Khalil Gibran. Durée:00:53
La cousine du collectionneur recourt contre la décision du tribunal
Uta Werner conteste le testament de son cousin, Cornelius Gurlitt, qui voulait faire du Musée des Beaux-Arts de Berne (KMB) son légataire universel. Elle a fait appel contre le jugement en première instance du tribunal de Munich qui avait rejeté ses prétentions.
Le tribunal des successions de Munich va examiner ce recours et décider s'il y a lieu de "modifier sa décision ou de transmettre le recours à la cour d'appel", indique le communiqué de presse du tribunal bavarois, publié mardi 28 avril. Dans le premier cas, il devrait au préalable entendre une nouvelle fois toutes les parties impliquées.
Décédé le 6 mai 2014, Cornelius Gurlitt avait hérité un important patrimoine artistique de son père, le marchand d'art Hildebrand Gurlitt. Par testament, il avait fait part de sa volonté de léguer au KMB cette collection très contestée, soupçonnée d'être issue de pillages perpétrés sous le régime nazi. Or la cousine de l'héritier a actionné la justice pour s'opposer à ce leg.
Le conseil de la fondation et la direction du KMB ont pris connaissance de ce recours. "Le KMB n'est toujours pas autorisé à assumer l'héritage qui lui a été légué par testament", indique le Musée dans un communiqué. L'action du KMB, quant à cette succession, reste toutefois "limitée au minimum indispensable", précise le Musée.
A Londres, 24 heures de marathon... informatique
A chacun son épreuve d'endurance: certains courent, comme les milliers de marathoniens ayant arpenté dimanche les rues de Londres, d'autres programment non-stop 24 heures durant, en rêvant d'inventer la prochaine application qui bouleversera internet. Durée:01:05
Dix jours de festival pour fêter l'écriture en Valais
Le Festival valaisan d'écriture se déroulera du 1er au 10 mai entre Monthey et Brigue. Ateliers, expositions, lectures, concerts, soit une trentaine d'événements sont au programme de cette deuxième édition.
L'un des événements phare du festival "Les correspondances" est l'exposition consacrée à l'ancêtre de l'ordinateur: la machine à écrire. Une quarantaine de ces machines sont mises en scène à l'Hôpital de Malévoz, à Monthey. Elles sont issues de la collection de Bernard Micheloud, la plus grande de Suisse romande, indiquent les organisateurs dans un communiqué.
La machine à écrire sera aussi au coeur de l'atelier animé par l'écrivain Eugène. Les participants écriront leurs souvenirs personnels liés à cet objet, puis lui donneront la parole.
L'esprit de "Charlie Hebdo" et la question de la liberté d'expression s'invitent également au festival via un espace dédié au "plaisir de persifler". Artistes et public auront scène libre pour s'exprimer.
Le théâtre et la musique s'allieront dans "Inmates'Voices Lettres". Il s'agit d'une performance d'une heure autour d'une correspondance entre la musicienne Joséphine Maillefer et Roy Swafford, prisonnier condamné à la peine capitale en Floride.
Côté lecture, le public entendra des correspondances de Rainer Maria Rilke en français et en allemand. Il s'agit de lettres rédigées à Sierre, dans lesquelles le poète mélange les deux langues, au gré de ses états d'âme.
Fête des mères oblige, les mamans seront à l'honneur en fin de festival. Le défi sera de réaliser la plus grande lettre aux mamans, une missive éphémère, rédigée à la craie sur les places de plusieurs villes du Valais. "La performance sera immortalisée par un drone", précisent les organisateurs.
Dix jours de festival pour fêter l'écriture en Valais
Le Festival valaisan d'écriture se déroulera du 1er au 10 mai entre Monthey et Brigue. Ateliers, expositions, lectures, concerts, soit une trentaine d'événements sont au programme de cette deuxième édition.
L'un des événements phare du festival "Les correspondances" est l'exposition consacrée à l'ancêtre de l'ordinateur: la machine à écrire. Une quarantaine de ces machines sont mises en scène à l'Hôpital de Malévoz, à Monthey. Elles sont issues de la collection de Bernard Micheloud, la plus grande de Suisse romande, indiquent les organisateurs dans un communiqué.
La machine à écrire sera aussi au coeur de l'atelier animé par l'écrivain Eugène. Les participants écriront leurs souvenirs personnels liés à cet objet, puis lui donneront la parole.
L'esprit de "Charlie Hebdo" et la question de la liberté d'expression s'invitent également au festival via un espace dédié au "plaisir de persifler". Artistes et public auront scène libre pour s'exprimer.
Le théâtre et la musique s'allieront dans "Inmates'Voices Lettres". Il s'agit d'une performance d'une heure autour d'une correspondance entre la musicienne Joséphine Maillefer et Roy Swafford, prisonnier condamné à la peine capitale en Floride.
Côté lecture, le public entendra des correspondances de Rainer Maria Rilke en français et en allemand. Il s'agit de lettres rédigées à Sierre, dans lesquelles le poète mélange les deux langues, au gré de ses états d'âme.
Fête des mères oblige, les mamans seront à l'honneur en fin de festival. Le défi sera de réaliser la plus grande lettre aux mamans, une missive éphémère, rédigée à la craie sur les places de plusieurs villes du Valais. "La performance sera immortalisée par un drone", précisent les organisateurs.
Le ministre de la culture Alain Berset inaugure le Salon du livre
Le 29e Salon du livre et de la presse de Genève a été inauguré mercredi en présence du ministre de la culture Alain Berset. Le conseiller fédéral a fait halte aux stands du canton du Jura et de la Fédération de Russie, invités d'honneur de la manifestation.
Le socialiste a retrouvé à Palexpo ses camarades de parti Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat genevoise, Sami Kanaan, maire de la Ville de Genève, ainsi que la ministre jurassienne Elisabeth Baume-Schneider, tous en charge de la culture. Le socialiste Michel Thentz, président du Gouvernement jurassien, et Isabelle Chassot, directrice de l'Office fédéral de la culture étaient aussi présents à l'inauguration.
"Le livre papier a fait son temps", a lancé de manière provocatrice Alain Berset, avant de démontrer par l'absurde qu'Internet ne remplacera jamais des ouvrages. "La mort du livre constitue, pour nous tous, notre pire cauchemar", a-t-il souligné.
Le dernier passage d'un conseiller fédéral au salon remonte à 2012, après le rejet du prix unique en votation. Depuis, la Confédération a réalisé des pas importants pour soutenir le livre, a relevé M. Berset. Le message sur la culture 2016-2020, en débat aux Chambres fédérales, inclut notamment un soutien structurel aux maisons d'édition et une augmentation du soutien à la traduction littéraire.
De son côté, Genève vient de renouveler son aide aux librairies indépendantes, a fait savoir Anne Emery-Torracinta. La magistrate a aussi donné les premiers résultats d'une enquête du canton sur les habitudes des lecteurs: très fort attachement au livre papier, achat de plus de dix livres par année indépendamment du prix, intérêt pour le numérique et des librairies de plus en plus polyvalentes.
Le Salon du livre et de la presse se tient jusqu'à dimanche. Plus de 1000 auteurs, des centaines de maisons d'édition et plus de 2000 événements sont prévus sur 32'000 mètres carrés pendant cinq jours. Parmi les nouveautés, figurent la Fabrique, un espace interactif invitant les visiteurs à se frotter à la création littéraire, ainsi que la tenue des premières Assises de l'édition francophone.
Exposition: faire feu de tout bois
Christiane Baumgartner, de Leipzig, est l’une des grandes artistes de la gravure contemporaine. Sa reconnaissance internationale est en marche. Une rétrospective de son travail s’est tenue récemment à l’Académie des beaux-arts de Paris.
En voici une autre, prenante, spectaculaire, au Musée d’art et d’histoire de Genève. Des grandes feuilles exposées, une constante apparaît: la tension entre le procédé utilisé, la gravure sur bois chère à la tradition allemande (de Dürer aux expressionnistes de Die Brücke), et les thèmes contemporains. Des avions et hélicoptères militaires, les voies de circulation, l’impact de l’homme sur la nature.
Christiane Baumgartner, dont le patronyme redouble sa démarche, accentue les lignes horizontales de ses xylographies jusqu’à en faire des motifs autonomes, qui se suffisent à eux-mêmes dans ses derniers travaux.
A partir de photos tirées de journaux, de vidéos ou de ses propres images, elle plonge également dans la mémoire allemande, par exemple avec le thème panthéiste de la forêt. Plus récemment, l’artiste s’est tournée vers la gravure en taille-douce (l’eau-forte) ou le dessin.
Le quotidien, le paysage, l’histoire: ce qui intéresse Christiane Baumgartner est la perception que nous avons du présent et du passé. L’accentuation des lignes et des trames, des effets de moirage et autres parasitages visuels troublent le regard au point que l’on se demande souvent ce que l’on voit dans ces grands formats, dont certains atteignent les quatre mètres.
Il faut reculer pour apercevoir ce qui peut être une explosion ou une vague gigantesque. Même dans les médias de masse, le monde reste opaque. La transparence des faits n’existe pas: l’affect et le laminoir du temps dressent un voile sur nos cornées.
Un tissu dont on distingue clairement le maillage mais confusément ce qu’il cache: le fracas de la guerre, l’indifférence de la nature, la banalité aliénante de notre environnement.
Agrandissez une image pour en découvrir le sens et vous ne verrez bientôt plus que des points, des lignes et des halos qui trahissent le mécanisme de sa reproduction. Laquelle date de l’époque de la gravure, de la photogravure industrielle, de la vidéo à l’ancienne.
C’est bien là la limite du parti pris esthétique de Christiane Baumgartner, peu préoccupée par les enjeux actuels de l’image numérique. Elle questionne la perception d’aujourd’hui, mais avec les moyens techniques d’hier.
Théâtre: Plaidoyer pour les rats
«Dehors, étranger, dehors!» C’est ainsi que la ville de Hamelin exprime sa reconnaissance au joueur de flûte venu la libérer d’une invasion de rats. On connaît le conte allemand, popularisé par les frères Grimm.
Mis en scène pour les enfants par la compagnie Pied de Biche, il prend pourtant une couleur très contemporaine, en regard de l’actualité. Les rats finissent noyés, eux qui étaient venus attirés par l’opulente Hamelin, confite dans sa suffisance. Et les mendiants quémandant des miettes sont tués à bout portant.
Pourtant, la pièce ne convainc pas. Les rats restent des rats, comme dans la propagande nauséabonde. Pourquoi ne pas leur donner voix? On peine à être touché par les autres personnages. Les bourgeois y sont puants, qui ne pensent qu’à l’argent. Avec le dératiseur, on se dit qu’il va peut-être se passer quelque chose.
Après tout, notre flûtiste est une hybridation inquiétante entre Marilyn Manson, l’Alex d’Orange mécanique, Willy Wonka et l’un des acolytes du diable dans le roman Le maître et Marguerite de Boulgakov. Il échappe au manichéisme par son ambiguïté. Pourtant, son sort nous est également indifférent.
Et pour cause: le spectacle qui devrait raconter la capture des sens par la musique est surchargé par une bande-son d’un rock démodé. Au moment où le flûtiste se met à jouer, nos oreilles sont déjà saturées.
Ensuite, en voulant mêler le jeu des acteurs avec des marionnettes de différentes tailles (créées par Christophe Kiss), la mise en scène devient confuse. Par peur d’ennuyer, elle en fait trop.
Au matin, pour se venger de ne pas avoir été payé, le flûtiste attire les enfants de la ville à sa suite. Un banc de brouillard traverse la scène, la lune s’y découpe. Un instant de calme, vertigineux et beau, que l’on aurait aimé voir se répéter.
Aleksandar Gatalica: tourbillon guerrie
Comment saisir un événement, soit la guerre de 14-18, qui se déroule en même temps dans plusieurs dizaines de pays, de la Russie à l’Angleterre en passant par la France, la Turquie ou la Serbie, et qui concerne des millions de gens, qu’ils soient rois, soldats ou marchands d’épices dans un bazar d’Istanbul?
C’est ce qu’a tenté, et réussi, Aleksandar Gatalica, 51 ans, l’un des romanciers serbes majeurs aujourd’hui, par ailleurs traducteur de grec ancien et chroniqueur de musique classique.
A la guerre comme à la guerre! est un roman étonnant, original, foisonnant, sage et moderne à la fois, érudit et populaire dans le même geste littéraire ambitieux et humaniste. En cinq longs chapitres, soit un par année de guerre, Gatalica nous fait valser de Sarajevo à Londres, d’une scène d’opéra de Berlin à la Closerie des Lilas à Paris, de personnages historiques – Kiki de Montparnasse, Nicolas II, Trotski, Mata Hari – à des héros fictifs attachants, qu’ils soient pilote, chanteuse ou petit commerçant.
Quatre-vingts personnages vont et viennent sous nos yeux, chacun pris dans l’engrenage de la folie meurtrière et, d’une certaine manière, liés les uns aux autres.
L’intérêt du roman est double: le point de vue balkanique de Gatalica nous sort de l’axe Paris-Londres auquel les commémorations récentes nous ont habitués. On se trouve soudain à Belgrade, à Corfou, à Sarajevo.
Et sa manière de lier, à chaque page, la grande histoire à la petite – quelle scène d’ouverture parfaite que l’arrivée des corps de l’archiduc et de sa femme sur la table d’autopsie du médecin légiste à Sarajevo –, de sortir des tranchées pour respirer cette Belle Epoque partie en vrille fait merveille dans ce qui est la première traduction française d’un livre de Gatalica.
Contre-temps: le tabou du prix
Fabrice Eschmann
Parler des prix en horlogerie est un sujet tabou. Du côté des marques d’abord: technique aussi bien qu’artistique, la montre mécanique est certainement l’un des produits dont la structure de prix est la plus complexe qui soit.
Technicité, matières, temps de développement, innovations, finitions, nombre de composants, durée de fabrication, limitation des exemplaires, diversité des versions, marché cible, niveau de luxe, image de marque, etc.: les critères entrant dans la fixation de la valeur d’une pièce sont aussi multiples que vagues.
Une situation qui rend toute comparaison déraisonnable et qui a permis pendant des décennies à un certain nombre d’acteurs de profiter de marges largement surfaites.
Côté consommateur ensuite, difficile donc, dans ce contexte, d’exiger une justification crédible de la valeur d’une montre. Encore moins de demander un rabais substantiel pour quelque motif que ce soit. Le domaine du luxe ne souffre aucune décote et les fabricants sérieux préféreront toujours racheter les vieux stocks plutôt que de décréter les soldes – autre notion taboue dans le domaine, d’ailleurs.
Finalement, le seul arbitre capable de mettre tout le monde d’accord, c’est le marché! Alors que les prix n’ont cessé d’augmenter ces dernières années – la valeur moyenne d’une montre mécanique suisse a plus que doublé en douze ans –, 2015 marque pour la première fois depuis longtemps un retour à des tarifs plus raisonnables.
Pas chez tout le monde, loin s’en faut, mais le phénomène est suffisamment important pour être décrypté comme une tendance.
Des dizaines de marques ont ainsi présenté des nouveautés sous la barre symbolique des 5000 francs. Et pas que de simples trois aiguilles, mais aussi des GMT, des montres de plongée dotées de profondimètre mécanique, des mouvements squelettés ainsi que des chronographes. Tissot réalise même la prouesse de proposer une pièce en or massif 18 carats – heures, minutes, secondes, date – pour 2395 francs. Ne demandez pas comment.
Livre: dieu habite dans le corps des femmes
«Le bleu de l’or». L’orgasme peut-il conduire au divin? Ou l’expérience mystique n’est-elle qu’un effet collatéral de notre aptitude à jouir? Le roman de Daniel Cordonier mêle quête et enquête.
Les femmes sont des géantes, fascinantes et opaques. On croit les saisir, les connaître, les pénétrer, et on s’aperçoit un jour qu’on a aimé une totale étrangère. Les femmes, dans l’univers de Daniel Cordonier, sont l’Autre absolu dont on ne saura jamais rien, mais dont le mystère domine notre vie. De là à ce que le féminin prenne carrément les traits d’une domina…
Au troisième roman, Daniel Cordonier a osé. Défiant le mauvais goût et les dégâts collatéraux des modes éditoriales, il propose même une audacieuse et perturbante méditation, à mille lieues du cynisme houellebecquien, sur les vertus de la soumission.
La dominatrice genevoise qu’il campe dans Le bleu de l’or revendique une fonction spirituelle: elle aide les hommes à guérir de leur méfiance, ce poison qui empêche d’accéder à l’amour. S’abandonner à l’Autre, voilà la victoire. Et peut-être le premier pas vers une extase moins terrestre.
Daniel Cordonier est psychologue et dirige l’Office d’orientation scolaire et professionnelle du Valais. Ceux qui l’ont découvert avec son premier livre, le formidable Ordre des femmes, savent peut-être comment il est devenu romancier: il voulait faire un livre de vulgarisation psychologique sur l’amour et le défi sans précédent que constitue le couple au troisième millénaire.
Devant la montagne de publications sur le sujet, il a cherché à se démarquer et a inventé le psycho-thriller à formule enrichie. Lequel se compose pour moitié de mystères, rebondissements et courses poursuites intérieures frénétiques, pour moitié de vulgarisation scientifique sur un sujet ou un autre.
La recette du Bleu de l’or reste fidèle à celle des deux premiers romans. L’alliage n’est pas toujours très harmonieux: on butte contre la maladresse des dialogues («Pourrais-tu développer ton explication?»), on progresse laborieusement dans certains passages, on regrette les flamboyances stylistiques des maîtres de l’écriture. Mais, au bout du compte, on est à la fois pris par l’intrigue et nourri, émotionnellement et intellectuellement.
L’ordre des femmes confrontait la psychologie jungienne et évolutionniste. Le féminin du temps nous initiait à la physique quantique. Avec Le bleu de l’or, on découvre la neurothéologie – qui traque les traces de Dieu dans le cerveau – à travers l’histoire de deux frères en quête d’extase.
Le premier, homme de vertu et de prière, l’atteint par la méditation; le second par la contemplation du corps des femmes. Mais le plus proche du divin n’est pas celui qu’on croit.
Voici quelques questions que le héros, Thomas Gottier, bijoutier genevois victime d’un séisme existentiel, est amené à se poser: l’orgasme peut-il conduire à Dieu? Ou alors l’expérience mystique n’est-elle qu’un effet collatéral de notre aptitude à jouir?
Au bord du gouffre, Thomas atteint une forme d’extase, avant d’apprendre qu’il souffre d’épilepsie, comme le prophète Mahomet et quelques autres. Epilepsie et crise mystique vont souvent de pair, lui confirme une neurologue. Mais une fois qu’on a dit cela? On n’a pas prouvé que la maladie ne fait pas partie d’un plan divin.
Que cherche Thomas, Dieu ou la femme? Il ne le sait pas lui-même mais, en racontant son histoire, il découvre une autre forme d’abandon: celle de l’écrivain à son lecteur, cet être auquel on s’adresse sans avoir la preuve de son existence. «Je m’en remets à vous», finit-il par nous dire. Belle mise en abyme de l’écriture comme quête spirituelle.
Marc Aymon: l’art de quitter la route
Rencontre. Sur son quatrième album, Marc Aymon chante pour la première fois les mots d’un autre. Coécrit avec le Breton Alexandre Varlet, «D’une seule bouche» est un disque lumineux.
Dès qu’on lui demande d’évoquer quelques titres de son quatrième album, il a les yeux qui brillent et la voix qui tremble. Il s’excuse, mais c’est plus fort que lui. Tenter de décrire D’une seule bouche, un disque enregistré aux studios La Frette, près de Paris, fait remonter une foultitude de beaux souvenirs qui vont l’accompagner longtemps.
Il est comme ça, Marc Aymon. A fleur de peau, sincère. On peut facilement lui coller des étiquettes, dire que c’est un gars attachant avec lequel on a envie d’aller boire un verre pour parler de la vie, mais ce serait omettre l’essentiel.
Marc Aymon, c’est surtout un bel artiste, un chanteur qui, en bientôt dix ans de carrière, a pris de l’assurance sans perdre de sa spontanéité. Au point que ça en devient agaçant: à chaque fois qu’il publie un nouvel enregistrement, on doit se résoudre à écrire qu’il s’agit là de ce qu’il a fait de mieux.
«Quitter la route, prendre un virage inattendu», chante-t-il sur Le virage, un titre joliment rentre-dedans, basse qui claque comme aux grandes heures de la new wave, rythmique binaire et voix cotonneuse. «Mon angoisse, ça a toujours été de refaire la même chose et de m’ennuyer, confesse le Valaisan.
J’aime aller là où je ne suis encore jamais allé, poser des questions, être aux aguets. Je préfère les petits chemins caillouteux à l’autoroute, passer par la fenêtre plutôt que par la porte.» Virage déjà en 2012, lorsqu’il revenait de Nashville avec un album plus rock et teinté de blues. Nouveau tournant cette année avec ce D’une seule bouche qui le voit interpréter des textes qu’il n’a pas écrits.
C’est grâce au photographe Yann Orhan que Marc Aymon découvre Alexandre Varlet, chanteur rare et précieux installé près de Saint-Malo. Il lui rend visite et lui propose quelques mélodies. Cela tombe bien, le Breton a des textes. L’entente est telle que les deux hommes se retrouveront en studio.
«Il aime le rapport à la nature, la folk et la country. Je savais qu’il pouvait m’emmener quelque part», dit le Romand qui, pour L’Hebdo, commente quatre de ses nouveaux morceaux.
«peut-être toi»
«C’est une des premières chansons qui est arrivée, et c’est ma préférée. J’adore l’histoire de Mickey Rourke, qui était allé demander à Bruce Springsteen de lui écrire un morceau pour The Wrestler. On lui propose souvent des millions pour écrire des chansons, et souvent il refuse parce qu’il réfléchit d’abord avec son cœur.
Dans ce film, Rourke joue le rôle d’un catcheur has been au moment où, dans sa vie, il est vraiment lui-même has been. Du coup, Springsteen lui a écrit The Wrestler, qui dit: «Si tu croises ma joie et mon sourire, c’est peut-être toi.»
Parfois, ce qu’on préfère chez soi, ce sont les gens qui nous entourent. Car ce qui est rassurant, c’est qu’ils nous entourent parce qu’ils nous ressemblent. Et moi, j’ai des gens tellement formidables autour de moi que j’espère leur ressembler. Peut-être toi, c’est une chanson qui commence guitare-voix.
On entend les respirations, on entend des craquements, le tabouret du batteur, puis sur le deuxième couplet arrive un orgue Hammond, un vrai, avec des notes magiques. Il y a une ouverture incroyable.»
«j’fais l’hélicoptère»
«On avait commencé ce titre avec seulement une guitare, mais finalement on s’est dit qu’on allait y ajouter des claviers et une batterie. Ce morceau est très pop, extrêmement musical. Quant au texte, on voulait un peu déconner. On ne sait pas trop ce que cela veut dire, on ne comprend pas totalement.
Je ne sais d’ailleurs finalement pas très bien expliquer cette chanson, parce que cet humour, c’est nouveau pour moi. Mais c’est en même temps une joie incroyable d’avoir trouvé une évidence qui me met en paix. J’ai l’impression que cela se ressent, et que le regard des gens sur moi est différent.
Je me sens habillé par ces nouvelles chansons. Elles sont belles, je n’ai eu qu’à les offrir. On a enregistré l’album dans des conditions live. On était tous en rond, on se regardait. On a laissé les silences, les hésitations. Il n’y a eu aucune manipulation, aucune compression du son. On a simplement joué. On a fait les choses pour se faire plaisir, comme je crois qu’elles devraient toujours être faites.»
«tu mets la barre haut»
«C’est une chanson très particulière. J’avais parlé à Alexandre d’une personne particulière, et d’un sentiment. Il m’a alors dit: «Attends, je vais te montrer quelque chose.» Et il m’a fait écouter cette chanson qui m’a ému. Il l’avait entièrement écrite et gardée dans un tiroir. C’est une simple déclaration d’amour, celle d’un homme à sa femme, ou d’un père à son fils.
S’emparer des mots d’un autre, même si tu y mets ta touche, c’est assez fabuleux. Parce que cela te fait dire des choses que tu n’aurais pas trouvées toi-même. Alexandre m’a amené dans des territoires inconnus, m’a fait chanter des choses plus sensuelles et plus rentre-dedans, que je n’aurais pas osé écrire. Je me suis laissé surprendre.
Est-ce que c’est bien moi? L’art peut nous aider à nous découvrir. Dans cette chanson, je me découvre père, je me découvre rassurant, observateur. C’est aussi un éloge de la lenteur, de la fuite du sensationnel. «Tu me donnes envie de devenir meilleur», c’est le plus beau compliment qu’on puisse faire à quelqu’un.»
«la force sous ton capot»
«Alexandre, c’est un grand amoureux de la Californie, où il n’est paradoxalement jamais allé. J’aimerais bien, un jour, l’emmener là-bas. On ira peut-être y écrire le prochain disque, qui sait… Dans cette chanson, il y a quelque chose qui évoque les grands espaces, Nashville. Il a aussi apporté de la sensualité, et ce côté Tom Petty, entre la force tranquille et le vieux baroudeur.
Ma voix est très posée, mais il y a cette image du galop des chevaux, qui dit que j’aime emporter les gens. J’adore ce refrain très mélodique, où l’on fait «waouh». A la fin, on entend cette guitare électrique qui sonne un peu faux, mais qui est vraie.
Y en a marre de devoir toujours être juste, parfait. Ce disque, je l’assume totalement, du début à la fin, jusqu’à l’extrême virgule. C’est d’ailleurs la première fois qu’on me voit de face sur la pochette. Sur la précédente, j’avais refusé une photo frontale.»
Livre: Jessica Brody, nouvelle star du «young adult»
Décodage.«Inaccessible», premier tome de la trilogie de l’Américaine Jessica Brody, débarque en français. Bienvenue dans le monde merveilleux du «young adult».
Séraphine, 16 ans, est retrouvée flottant au milieu de l’océan après le naufrage du vol Freedom Airline 121. Autour d’elle, aucun autre survivant. Elle ne se souvient de rien, ni des raisons pour lesquelles elle était dans l’avion, ni de sa famille, ni de sa maison.
Seul ce garçon étranger, Zen, dit la connaître, l’aimer et l’avoir sauvée d’un laboratoire secret. Vrai? Faux? A qui faire confiance? Dans ce futur proche où l’on peut manipuler les souvenirs, comment retrouver sa mémoire et donc son identité?
Inaccessible est le premier tome d’une trilogie signée d’une trentenaire américaine, Jessica Brody, nouvelle coqueluche de la littérature dite young adult. C’est écrit comme on compose une dream team en basket ou en foot, en réunissant tous les ingrédients qui assurent une victoire dans le cœur des lecteurs: suspense, tragédie, mystère, action, sentiment amoureux, jeune fille solitaire et courageuse en perdition, quête existentielle aiguë, scientifiques manipulateurs.
Labyrinthe & co.
Tête bien faite, diplômée en économie, français et japonais du Smith College, employée des studios MGM durant quatre ans avant de tout quitter pour écrire, Jessica Brody a vendu cinq romans en quatre ans, déjà tous traduits dans plus de dix langues.
Inaccessible s’inscrit dans les traces à succès de Labyrinthe, série de James Dashner puis film de Wes Ball, de Nos étoiles contraires de John Green aussi porté à l’écran, ou de la trilogie Jenna Fox de Mary E. Pearson, qui voit une jeune fille se réveiller d’un long coma après un accident de voiture et découvrir que les médecins sont allés au-delà des limites de l’acceptable pour la sauver.
Il est loin, le temps où le lecteur de Madame Bovary ou de L’amant jurait ne jamais aller voir au cinéma l’adaptation de son livre préféré de peur de voir son livre trahi: Jessica Brody, dont la trilogie est en cours d’adaptation par les producteurs du film Vampire Academy, lui-même tiré de la série papier signée Richelle Mead, symbolise un univers 100% transmédia où tous les supports de divertissement culturel sont connectés, à l’image des consommateurs adolescents qui passent du livre au film ou au jeu vidéo, et inversement, avec un naturel déconcertant, déclinant à l’infini l’univers auquel ils s’identifient. Jessica produit d’ailleurs elle-même des trailers pour chacun de ses films dignes des meilleures bandes-annonces de cinéma.
Côté lecteurs, c’est la même flexibilité. Vous souvenez-vous des débats qui accompagnèrent, dans les années 90 et jusqu’à son entrée dans le Larousse en 2010, l’apparition du mot «adulescent»?
D’un côté, des sociologues comme Vincent Cespedes assuraient que ce concept évoquait le «prolongement diffus de la crise d’adolescence»; de l’autre, des Tony Anatrella y voyaient des «adultes qui tentent de s’identifier aux adolescents et non l’inverse».
Les deux sont vrais, et le domaine éditorial estampillé young adult, aussi appelé cross-age, en constante progression depuis une décennie dans les pays anglo-saxons et quelques petites années en France, est le reflet de l’ambiguïté de ce public.
A chacune sa couleur
Si le cœur de cible est une lectrice âgée de 14 à 20 ans, les trentenaires en sont de grandes consommatrices, tout autant que les mères desdites adolescentes. A chacune sa couleur: les plus jeunes se retrouvent dans la fantasy et la bit-lit d’inspiration vampirique, les trentenaires dans la chick lit citadine et piquante, et les plus âgées dans la romance tendance Harlequin modernisée.
C’est devenu une affaire très sérieuse puisque le magazine et site professionnel The Bookseller, équivalent anglais de Livres Hebdo, a lancé cet hiver un premier prix de littérature young adult qui a été remporté par Louise O’Neill pour son premier roman, une dystopie féministe intitulée Only Ever Yours.
A 30 ans et quelques miettes, Jessica Brody a d’ailleurs tout exploré, du mom porn (The Fidelity Files, Love Under Cover) à la littérature ado (The Karma Club, 52 Reasons to Hate My Father, My Life Undecided) avant de publier la trilogie Inaccessible qui fait le cauchemar des libraires au moment de choisir le rayonnage de vente, puisqu’elle s’adresse à un public situé exactement entre la jeunesse et l’âge adulte. Mais le cœur a ses raisons.