Le cinéaste japonais Hayao Miyazakisigne avec «Le vent se lève» un beau film sur la conquête du ciel et la concrétisation des rêves.
Animation. L’envol et la chute. Chez Hayao Miyazaki, l’un ne va pas sans l’autre. Le maître signe un long métrage destiné aux adultes, retraçant la vie au Japon pendant l’entre-deux-guerres. Le vent se lève évoque tempêtes et orages de l’histoire. Pêle-mêle: le tremblement de terre de Kanto en 1923, la Grande Dépression, l’épidémie de tuberculose et la course folle à l’armement. Ces crises, nous les voyons à travers Jiro, inventeur aéronautique de génie qui rêve de voler depuis son enfance. Miyazaki l’a développé en s’inspirant de deux personnages historiques: Jiro Horikoshi, qui créa l’avion militaire le plus performant du monde entre 1940 et 1942, et l’écrivain Tatsuo Hori pour l’aspect affectif de Jiro.
Le vent se lève emprunte son titre à un vers de Paul Valéry: «Le vent se lève, il faut tenter de vivre». C’est un message adressé au Japon contemporain, marqué lui aussi par des crises, une invitation au dépassement, à l’invention et à l’innovation. Visuellement, le film est à couper le souffle – la scène du tremblement de terre, le paysage se dérobant comme un drap que l’on secoue. Il télescope aspirations à l’envol et pesanteur d’une époque troublée, qui ramène sans cesse les hommes à leur finitude. On n’y trouvera pas le surnaturel enjoué et inquiétant du Château ambulant ou du Voyage de Chihiro. En revanche, on y redécouvre la passion de Miyazaki pour les machines du tournant du XIXe siècle. Et l’ambivalence fondamentale de ses personnages. A l’image de ces avions, merveilles d’élégance qui deviennent aussi de redoutables machines à tuer. Ou de ces rêves heureux qui imposent, pour se réaliser, le sacrifice des êtres aimés.
De Hayao Miyazaki. Japon, 2 h 06.