A l’heure où sort le deuxième filmadapté de la trilogie littéraire «Hunger Games», petite analyse en trois adjectifs de l’héroïne qui fascine tant les ados.
Il y a eu la Bella Swan de Twilight, il y a la Katniss Everdeen de Hunger Games, saga littéraire en trois tomes qui a déchaîné les passions adolescentes avant d’être logiquement transposée au cinéma.
Katniss vit à Panem, nation postapocalyptique et totalitaire où douze districts ultrapauvres entourent le Capitole, une capitale prospère et futuriste. En souvenir d’une tentative de révolution qui a vu jadis l’éradication d’un treizième district, le gouvernement de Panem organise chaque année les Hunger Games. Vingt-quatre adolescents de 12 à 18 ans, des tributs tirés au sort à raison d’un garçon et d’une fille par district, sont livrés à eux-mêmes dans une très vaste arène truffée de pièges et de caméras. Le but du «jeu»: s’entretuer jusqu’à ce qu’il ne reste plus qu’un seul survivant.
Alors que l’adaptation cinématographique du deuxième volume de Hunger Games, sous-titré L’embrasement, débarque en grande pompe sur les écrans, une question se pose. Pourquoi Katniss séduit-elle autant le jeune public? Tentative de réponse en trois adjectifs.
Innocente
Afin d’éviter à sa petite sœur une mort quasi certaine, Katniss se porte volontaire à sa place lorsqu’elle est tirée au sort pour prendre part aux Hunger Games. Elle quitte alors son meilleur ami, Gale, et se retrouve à lutter dans l’arène aux côtés de Peeta, tribut mâle de son district, le douzième. A la fin du premier épisode, les deux jeunes gens, ultimes survivants de ces jeux de la mort, menacent de se suicider. Le Capitole les déclare alors vainqueurs ex æquo. Mais voici que dans L’embrasement, Katniss est parachutée une seconde fois dans l’arène. Funeste surprise, les tributs sont exceptionnellement prélevés parmi les anciens gagnants.
Malgré ces douloureuses épreuves, Katniss parvient à garder une certaine innocence, notamment dans ses relations avec les autres. Alors qu’elle est au cœur d’un triangle amoureux et que ses sentiments envers Gale et Peeta sont confus, elle sait rester sincère et ne cherche jamais à manipuler les deux garçons. Partenaire à l’écran de Jennifer Lawrence, qui donne beaucoup de consistance au personnage imaginé par la romancière Suzanne Collins, Liam Hemsworth résume ainsi l’attrait qu’exerce la jeune héroïne sur les lecteurs et spectateurs: «Je pense que beaucoup de jeunes respectent le personnage de Katniss parce qu’elle reste elle-même et ne laisse pas le système la changer.»
Altruiste
Katniss aime profondément sa famille et ses amis, au point d’être prête à se sacrifier pour sa sœur. Alors que les Hunger Games révèlent la vraie nature de chacun, désinhibent les ego et poussent les adolescents à ne penser qu’à eux-mêmes, la jeune fille ne peut se résoudre à tourner le dos aux autres et à son humanisme, à ne pas aider quelqu’un dans le besoin. Avoir gagné une compétition qui a vu mourir 22 personnes est pour elle source d’une grande souffrance morale. Katniss est tenaillée par un sentiment de culpabilité qui va mettre à mal son altruisme, mais ne changera pas son moi profond. L’héroïne prouve que le passage à l’âge adulte peut se faire sans abandonner ses valeurs.
Rebelle
Age de tous les possibles où l’on rêve de n’en faire qu’à sa tête, l’adolescence est souvent synonyme de conflit avec l’autorité, qu’elle soit parentale, scolaire ou sociale. Or, tout en étant victime d’un système injuste et répressif, Katniss parvient à garder une certaine indépendance, à défier les conventions et à transgresser les lois, mais pour de nobles motifs. Si elle quitte régulièrement le district 12 pour pénétrer dans la forêt interdite, c’est pour chasser et nourrir sa famille. De l’indépendance de Katniss découlent un courage et un volontarisme à toute épreuve. Bien que victime, la jeune femme acquiert une dimension quasi mythologique, devient une Diane chasseresse immortelle. Perçue par le Capitole – et malgré elle – comme une rebelle, un modèle à même de pousser les districts à tenter une nouvelle insurrection, elle symbolise la lutte du bien contre le mal, de la lumière contre l’obscurantisme, la révolte du peuple contre les nantis. Comment ne pas s’identifier à elle?
«L’embrasement»
C’est (le début de) la lutte finale!
En renvoyant Katniss dans l’arène, le Capitole a un but: éliminer la jeune fille, qui est devenue le symbole d’une possible rébellion. Plus intéressant que le premier épisode de la trilogie (dont le dernier tome sera adapté en deux parties), Hunger Games – L’embrasement présente une Katniss fragile qui, tel Sisyphe, va se retrouver une nouvelle fois au pied de la montagne. Personnage au profil psychologique intéressant, elle est à la fois active et passive, va devoir lutter pour sa survie tout en étant dépassée par des événements qu’elle a déclenchés sans le savoir.
Tout aussi intéressants, les personnages secondaires échappent à toute tentative de lecture univoque et contribuent à l’étrangeté de ce blockbuster intelligent dans sa façon de s’approprier des éléments issus du péplum, de la science-fiction, du film d’aventures et de la contre-utopie. A Genève, le multiplexe Pathé Balexert profite de cette sortie pour inaugurer sa salle IMAX. Ecran gigantesque (la deuxième partie de L’embrasement a été filmée avec une caméra spéciale pour l’occuper en intégralité), image et son en très haute définition: l’expérience est intéressante, mais plus chère (+4 francs) et pas franchement déterminante pour un film en 2D.
De Francis Lawrence. Avec Jennifer Lawrence, Josh Hutcherson et Philip Seymour Hoffman. Etats-Unis, 2 h 26.
A Genève (Balexert), projection en IMAX jusqu’au 10 déc.