Le Montreux Comedy Festivalaccueille cinq humoristes anglophones qui symbolisent l’essor du continent noir.
Les grandes stars de l’humour seront, dans cinq ou dix ans, issues d’Afrique noire. Fondateur et président du Montreux Comedy Festival, Grégoire Furrer en est convaincu. En guise de première incursion sur ce continent où tout est encore à découvrir, il a programmé – les 6 et 7 décembre prochain – deux soirées anglophones qui verront défiler cinq comiques, trois Sud-Africains, un Ougandais et un Malawite.
«Jusqu’à présent, l’humour anglophone était confiné à trois pays, résume Grégoire Furrer. L’Angleterre, les Etats-Unis et l’Australie. Or, depuis quelque temps, on voit arriver sur le marché de plus en plus de talents issus de pays nouveaux, et pour qui l’anglais est une deuxième langue. L’Afrique est de ce point de vue un immense vivier.
Et, inédit, grâce aux réseaux sociaux, ces humoristes touchent aussi bien leur communauté que les diasporas. Le Sud-Africain Loyiso Gola a entre 300 000 et 400 000 followers, l’Egyptien Bassem Youssef plus de 3 millions! Ces audiences gigantesques intéressent du coup énormément l’industrie historique, à savoir les chaînes de télévision et les gros producteurs internationaux. Il était donc indispensable pour un festival comme le nôtre, toujours à la recherche de nouvelles idées, de s’intéresser à l’Afrique.»
Trente ans après le sketch L’Africain de Michel Leeb, un numéro au fort relent postcolonialiste, on ne peut que se réjouir d’avoir la possibilité de découvrir de nouveaux visages. Et une nouvelle forme d’humour? «Pour moi il n’y a pas plus d’humour africain qu’il y a d’humour romand ou québécois, tranche Grégoire Furrer. L’humour est quelque chose d’universel, mais c’est sûr que chaque humoriste se nourrit de son environnement, de son vécu, de sa région. Sinon, je dirai que les Africains posent un regard décalé sur le monde. Ils nous apportent une grosse bouffée d’oxygène alors que l’humour francophone est de plus en plus formaté, qu’il y a moins d’ovnis.
Au-delà de cela, je trouve intéressant que, en Afrique, malgré toutes les souffrances et les drames, les gens s’amusent, rigolent, se baladent dans la rue avec le sourire aux lèvres. Ce sont donc de très bons clients pour l’humour.»
Du stand-up au vaudeville. Le président du Montreux Comedy Festival explique encore que, pour lui, l’humour africain s’articule autour de trois grands axes: le stand-up, très influencé par la culture anglo-saxonne et prisé des citadins, un humour hérité de la tradition du conte et reposant sur des histoires et, enfin, de longs sketchs plus populaires incluant des éléments de la farce et du vaudeville. Mais, finalement, ce nouvel eldorado qu’est le continent noir est-il circonscrit à sa partie anglophone? Non, répond Grégoire Furrer en citant les nombreux comiques qui sont en train de se faire un nom au Sénégal, au Cameroun, au Togo, en Côte-d’Ivoire ou encore au Bénin.
L’année prochaine, il espère d’ailleurs bien programmer une soirée africaine francophone. «Si on prend un risque avec ces artistes anglophones? Tout ce que je peux dire, c’est que j’espère qu’on aura du monde… On a en tout cas fait le pari d’une troisième salle, le Montreux Comedy Stand-Up, qui est l’espace dans lequel le festival de jazz a créé son Club. C’est un lieu modulable, et on va partir sur une configuration à 100-150 places. On verra…» Une chose est sûre: il n’y aura pas assez de place pour l’ensemble des followers de Loyiso Gola!
«Stand-Up Africa», les 6 et 7 décembre à 20 h. Montreux Comedy Festival, du 4 au 10 décembre. www.montreuxcomedy.ch