Rencontre. Les Français reviennent avec un quatrième album, le premier en dix ans. Avec cette idée que leur musique parle pour eux.
C’était en mars 2012. Dans une brasserie parisienne, Gaëtan Roussel et Arnaud Samuel évoquaient le premier album de Tarmac, le groupe qu’ils avaient fondé après avoir mis en veille Louise Attaque, dont le premier enregistrement, sorti en 1997, reste avec 3 millions de copies le disque le plus vendu de l’histoire du rock français. On les savait peu enclins à se livrer, on en a rapidement eu la confirmation. Tandis que le premier regardait ses pieds, le second avouait faire de la musique parce qu’il aime faire de la musique.
Janvier 2016. C’est à Genève qu’on retrouve les deux Français, dans la suite d’un palace avec vue imprenable sur la rade et les Alpes. Robin Feix est là aussi, et s’étonne que le jet d’eau ne fonctionne pas. Dix ans après un premier retour et le disque A plus tard crocodile, une merveille, les Louise sont à nouveau d’attaque. Nouvel album – Anomalie, le quatrième – et nouvelle tournée. Le temps a passé, Gaëtan Roussel a sorti deux albums solo et produit Alain Bashung, ses complices ont multiplié eux aussi les expériences, mais ils sont toujours aussi peu volubiles.
En une petite trentaine de minutes passées en leur compagnie, on n’apprendra pas grand-chose. Réponses courtes et évasives, lorsque réponses il y a, le trio se livre à demi-mot. «On n’a pas regardé dans la même direction», pour expliquer le départ d’Alexandre Margraff et un retour à trois; «s’est ensuivie une discussion qui a duré presque un an», pour dire qu’après des retrouvailles sur un plateau télé, ce quatrième enregistrement ne s’est pas imposé de lui-même.
Continuité et rupture
Anomalie, qui joue avec des rythmiques électros et possède un groove qui devrait surprendre ceux qui fredonnent encore le tube J’t’emmène au vent, semble dérouter les musiciens eux-mêmes. «Continuité, rupture, évolution», dit Arnaud Samuel pour le décrire. Avouons-le, en marge de titres efficaces à défaut d’être brillants (La chute, Chaque jour reste le même, A l’intérieur), quelques chansons bien fades tirent le disque vers le bas (L’insouciance, Les pétales, Un peu de patience). On est loin du beau vertige que provoquait A plus tard crocodile.
Une interrogation demeure: Louise Attaque est-il encore ce formidable groupe de scène qu’il était à ses débuts? «On est très impatients», affirme en tout cas Arnaud Samuel lorsqu’on évoque les concerts à venir. «On a besoin de vivre cet album», enchaîne mollement Gaëtan Roussel. Gageons qu’instruments en main ils seront plus généreux.
«Anomalie». De Louise Attaque. Barclay/Universal. Sortie le 12 février. En concert le 8 mars à Thônex (Salle des fêtes).
