La vie que je t’ai donnée, de Luigi Pirandello, raconte une étrange histoire. L’histoire d’une mère, Donn’Anna, qui s’absente d’elle-même et du présent pour ne pas devoir admettre le décès de son fils. Il vient pourtant de mourir dans la pièce d’à côté, mort peut-être de son amour malheureux pour une femme mariée. Il faudra que cette femme arrive et lui annonce qu’elle porte l’enfant de son enfant pour que peu à peu Donn’Anna accepte de dire et de penser la mort. Cette pièce a été créée en 1923; depuis, les mœurs ont bien changé, mais la douleur reste la même.
Pour accompagner ce voyage vers l’acceptation de la perte, le metteur en scène Jean Liermier a construit un univers que l’on dirait sorti d’un tableau d’Edward Hopper. D’un côté la fenêtre, de l’autre la porte, au fond l’espace annoncé d’un escalier. Personnages élégants, agités ou hiératiques, les acteurs sont au centre de cet espace dépouillé, habillés de silence et comme découpés par la lumière. Abstraction sensible ou réalisme discret? Balançant entre la blancheur harmonique et le vibrato de la chair, la pièce semblait encore hésiter entre deux sillons lors de la première. Gageons qu’au fil des représentations elle saura préciser sa voix.
Théâtre de Carouge. Jusqu’au 14 février.
Renens, Théâtre Kléber-Méleau. Du 1er au 20 mars.