Sion vient de lui décernerson premier Prix d’architecture. Portrait.
On parle beaucoup d’architecture et d’urbanisme valaisans ces temps-ci. Et pour en dire le plus grand bien. Lauréate du prix Wakker 2013 (remis le 21 septembre), la Ville de Sion vient à son tour de décerner son propre Prix d’architecture. Attribué pour la première fois, il récompense André Perraudin pour l’ensemble de son œuvre. Un moment de grande émotion puisque la cérémonie, qui devait rendre hommage à un presque centenaire, se déroula finalement sans lui. André Perraudin est décédé le 30 août, à l’âge de 98 ans. Le prix s’accompagne d’une exposition de photos de Michel Bonvin et d’une plaquette invitant les Sédunois et leurs hôtes à partir, plan en main, sur les traces de cet architecte prolifique.
André Perraudin, c’est un peu l’homme qui a donné à Sion son visage actuel. On l’a parfois même qualifié d’«architecte quasi officiel du Valais des années 50». Au départ, pourtant, les choses n’ont pas été simples. Né en 1915, quatrième d’une fratrie de cinq enfants, André Perraudin a financé ses études à l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich grâce à un emprunt, puis au moyen de ses indemnités de pilote dans l’armée. Mobilisé pendant la Seconde Guerre mondiale, il a ouvert son bureau d’architecte en 1945, dans son propre appartement. L’année suivante déjà, il remportait son premier concours. On le retrouvera ensuite impliqué dans deux des plus importants projets valaisans de l’époque: le développement de la station de Montana et le chantier de la Grande Dixence où il a construit l’étonnant hôtel Ritz, baptisé ainsi par les ouvriers auxquels il était destiné.
Achevé en 1956, réalisé avec Jean Suter, le siège de la Banque cantonale du Valais à Sion fait partie des bâtiments les plus emblématiques de Perraudin. Prenant ses distances avec le Mouvement moderne et le plan libre cher à Le Corbusier, il s’y affirme en héritier du français Auguste Perret et de son «classicisme structurel». Le hall des guichets a été placé derrière la façade principale, dans un endroit bien éclairé et visible dès l’entrée «comme dans une gare». La structure du bâtiment est en béton bouchardé composé de gravier du Rhône, avec un tiers de gravier concassé provenant de la pierre rouge de Collonges. «L’architecture doit révéler avec franchise le système de construction et les matériaux employés, générateurs de beauté sans l’artifice de crépis, de fards, de décorations trompeuses», estimait André Perraudin.
Le Valais de l’après-guerre était en pleine mutation, le besoin de nouvelles infrastructures se faisait sentir dans tous les domaines. André Perraudin répondra avec rigueur aux programmes les plus divers. Il va ainsi construire des écoles, du logement locatif, des villas, des usines, des centrales électriques, des hôtels, des entrepôts et même des églises. On dénombre aujourd’hui près d’une trentaine de ses réalisations à Sion (dont une quinzaine au centre-ville) et dix-sept hors de la commune. «Chaque projet se réfère au site de par son échelle, de par la justesse de son implantation, de par des aménagements extérieurs réfléchis, de par la force du parti», écrit l’architecte de la Ville Renato Salvi. A chacun maintenant de les (re) découvrir.
Exposition du Prix d’architecture 2013. Sion, hall du Bâtiment communal (23, rue de Lausanne). Jusqu’au 18 avril 2014.