Un jour de novembre 1849, l’écrivain français Gustave Flaubert et l’infirmière anglaise Florence Nightingale se trouvent sans le savoir sur le même bateau partant d’Alexandrie pour gagner le Caire puis les vestiges de l’Egypte antique. Ils ne se connaissent pas, ne se rencontreront jamais: Florence fuit une famille bourgeoise qui désespère de ne pas la voir mariée à presque 30 ans. Flaubert, 28 ans, se considère comme un écrivain raté et vient chercher en Egypte l’inspiration à l’invitation de son ami Maxime Du Camp.
Anthony Sattin, journaliste anglais spécialisé dans les récits de voyage à qui l’on doit déjà l’édition des Lettres d’Egypte de Florence Nightingale en 1987, raconte magnifiquement comment ce voyage bouleverse leur existence, mêlant enjeux personnels et artistiques sur fond de la vague d’orientalisme sans précédent qui balaie l’Europe. Un hiver sur le Nil raconte magnifiquement ces quelques semaines durant lesquelles elle court les mosquées, les temples et les tombeaux, lui les cafés et les bordels, à la recherche finalement de la même chose: un sens à leur vie.
A son retour d’Egypte, Flaubert perd sa «virginité d’homme inédit», comme il le disait, et publie Madame Bovary en 1853. A son retour d’Egypte, Florence a le courage de dire à sa famille qu’elle ne se mariera pas et souhaite se consacrer aux autres en devenant infirmière. Elle devient célèbre durant la guerre de Crimée avant de travailler aux réformes de la santé dans son pays. Le 31 décembre 1849, depuis Louqsor, elle écrit à ses parents: «On se demande comment les gens peuvent aller en Egypte et rentrer tranquillement chez eux sans rien changer à leur vie.»C’est ce qu’on appelle la fidélité à soi-même.
«Un hiver sur le Nil. Florence Nightingale et Gustave Flaubert, l’échappée égyptienne.» D’Anthony Sattin. Noir sur Blanc, 296 p.
