Quantcast
Channel: L'Hebdo - Culture
Viewing all articles
Browse latest Browse all 4553

Michel Legrand, l’émotion à tout prix

$
0
0
Jeudi, 26 Novembre, 2015 - 05:59

Interview. Le compositeur français, auteur de quelque 250 musiques de films, publie à 83 ans un album enregistré en compagnie d’une douzaine d’artistes d’horizons différents.

Formidable, magnifique. Deux adjectifs qui reviendront souvent pendant la courte conversation téléphonique avec Michel Legrand. A 83 ans, le compositeur publie un nouvel album. Et ça le met en joie. Intitulé tout simplement Michel Legrand et ses amis, il y revisite une douzaine de ses chansons en compagnie d’artistes aussi différents que Charles Aznavour, Muriel Robin, Laurent Gerra, Thomas Dutronc, Maurane, Hélène Ségara, Christophe Willem ou encore Chico & The Gypsies.

D’emblée, Michel Legrand a un mot gentil pour chacun. Car «ils sont tous formidables». Il évoque Laurent Gerra, «tellement drôle», Muriel Robin, «magnifique en titi parisien», tandis que Christophe Willem est qualifié de «délicieux», Thomas Dutronc de «charmant». «Et la chanson que je chante à la fin est très belle», poursuit-il. Celle-ci s’appelle Quand tu reviendras. il l’interprète d’ailleurs avec une émotion palpable, même si sa voix, au fil des couplets, faiblit et s’épaissit.

Relecture jazzy d’un classique

Pour le Français, «tout art est fait d’émotion. Quand Maurane chante, je pleure tellement c’est beau; pourtant, L’adieu est une chanson que je connais bien. Quand Hélène Ségara chante La valse des lilas, je suis aux anges, je me promène avec elle dans des sphères de douleur et de larmes.» Afin de mieux coller aux univers et aux voix des «amis» qu’il a invités et accompagnés au piano, il a proposé à chacun un choix de quatre à cinq chansons, dont certaines très rares, voire jamais enregistrées jusque-là. On trouve néanmoins sur le disque deux classiques, issus des quelque 250 musiques de films qu’il a composées: Les moulins de mon cœur, dans une relecture jazzy que s’approprie avec malice Aznavour, et la Chanson des jumelles, reprise avec bonheur par le duo Brigitte en mode carnaval. Lorsqu’on entend Muriel Robin murmurer un Paris violon qui célèbre les bords de la Seine et les rues qui se changent en jardin, on est en revanche happé par une émotion plus sombre. On pense à cette ville hier insouciante et chantante, aujourd’hui meurtrie. «Oui, c’est terrible», se contente de glisser Michel Legrand.

Nous essayons alors d’en savoir un peu plus sur son rapport à la musique, mais il ne répond pas vraiment, là non plus. «Je leur ai donné une chanson comme cadeau, et comme cadeau ils me l’ont chantée splendidement», résume-t-il après avoir une nouvelle fois aligné les superlatifs. Ces cadeaux, malheureusement, ne sont pas de valeur égale. Si les titres interprétés par Thomas Dutronc (Alcatraz), Maurane (L’adieu), Christophe Willem (On va chez toi ou on va chez moi) ou Chico & The Gypsies (Nous voyageons de ville en ville) séduisent, les imitations qu’aligne Laurent Gerra sur Ça va, ça va laissent perplexe, de même que le ténor Vincent Niclo est trop dans la performance lorsqu’il interprète Un parfum de fin du monde.

«Je suis un aventurier»

Michel Legrand, et c’est ce qui a contribué à faire de lui un compositeur si prisé des cinéastes, évolue à la croisée du jazz, du classique et de la pop. «Je dois tout à mes maîtres, Nadia Boulanger et Henri Challand, confesse-t-il. J’ai suivi toutes les classes d’instrument, je possède une technique formidable. En fait, je suis un aventurier. J’aime me lancer dans des aventures originales, j’aime qu’on ne sache pas très bien ce qu’on est en train de faire, afin de se permettre toutes les audaces possibles.» L’audace, il en a fait preuve dès la fin des années 50, après sa rencontre, décisive, avec le réalisateur Jacques Demy. Evoquant Lola, Les parapluies de Cherbourg et Les demoiselles de Rochefort, dont il a composé les immortelles bandes originales, il se dit fier d’avoir «inventé le cinéma musical, quelque chose que personne n’avait jamais entrepris».

«Vous savez, j’ai travaillé dans un bonheur fou pour le cinéma, c’est formidable, conclut-il. La musique de cinéma, c’est un travail spécial. Il faut de l’imagination, savoir comment le film est réalisé, ce qu’il attend, ce qu’on peut lui apporter.» Une chose est sûre, Michel Legrand lui a apporté beaucoup, au cinéma. Ce qui fait qu’au regard de son extraordinaire carrière, saluée par trois oscars, son dernier album se révèle plus anecdotique que véritablement essentiel.

«Michel Legrand et ses amis». De Michel Legrand. Sony Music. Sortie le 27 novembre.

Edition: 
Rubrique Print: 
Image: 
Sony Music
Rubrique Une: 
Auteur: 
Pagination: 
Pagination visible
Gratuit: 
Contenu récent: 
En home: 
no

Viewing all articles
Browse latest Browse all 4553

Trending Articles