Rencontre. Après un deuxième album résolument sombre, le duo électro-pop de Manchester propose avec «Surrender» un enregistrement épique et solaire.
Etrange de démarrer une rencontre avec deux musiciens de Manchester par une discussion autour du patinage artistique. Ce jour-là, sur une terrasse du bord du Léman, Theo Hutchcraft et Adam Anderson – qui se produisent depuis six ans sous le nom de Hurts – évoquent leur premier passage à Lausanne. Ils accompagnaient alors le spectacle itinérant Art On Ice. Sur une scène aménagée à l’une des extrémités de la glace de la patinoire de Malley, ils mettaient en musique les pirouettes et triples sauts d’une troupe de patineurs dont le Valaisan Stéphane Lambiel est, avec ses deux titres mondiaux, la figure de proue.
«On faisait en quelque sorte nous aussi partie des spectateurs, se souvient le chanteur Theo Hutchcraft. C’était comme regarder un spectacle, une expérience très différente. On a voyagé en Suisse et visité votre pays de manière différente, de même qu’on a pu découvrir le patinage artistique. Les patineurs sont des athlètes incroyables, ils sont totalement dévoués et on a beaucoup appris en les observant. On en a vu un se casser une côte devant nous en chutant mais continuer à patiner.» De ce passage en Suisse date également la découverte des Mountain Studios de Montreux, où Hurts a enregistré une partie de Surrender, son troisième album.
Un album plus sombre
A leur échelle, les deux Mancuniens sont eux aussi des stakhanovistes de leur art. Depuis la sortie en 2010 de leur premier album, Happiness, ils ne cessent de parcourir le monde avec leur électro-pop atmosphérique. Il y a deux ans, ils opéraient un léger virage avec Exile, un album plus sombre et oppressant. Mais le public les a suivis, ce qui les a confortés, disent-ils, dans l’idée qu’ils bénéficient dorénavant d’une confiance leur permettant d’avancer sereinement et de rester honnêtes avec eux-mêmes, alors qu’avant de former Hurts ils ont passé plusieurs années à expérimenter diverses formules sans susciter d’intérêt. «Pour Surrender, on voulait faire quelque chose de différent, mais on ne savait pas trop quoi avant de commencer à travailler, raconte Theo Hutchcraft. Comme on ne voulait pas revisiter l’ambiance sombre d’Exile, la lumière est venue naturellement, comme une réaction. Mais ça a été un challenge d’élargir notre horizon.»
Lumineux, on pourrait aussi dire ample ou épique, c’est en effet l’un des premiers adjectifs qui surgissent lorsqu’il s’agit de qualifier Surrender, un album très contrasté qui se permet quelques jolies incursions vers des sonorités plus disco, comme sur ce très dansant Kaleidoscope. «Un morceau qui évoque la simplicité et la légèreté pop de Fleetwood Mac», précise Adam Anderson, en charge des arrangements au sein du duo. Un groupe qu’il a beaucoup écouté durant l’enregistrement, même si en absolu Depeche Mode reste «la» référence. «De manière globale, on a injecté plus de vie dans cet album.»
Comme Depeche Mode, la noirceur new wave en moins, Hurts a ce don de provoquer des émotions à travers ses morceaux. Theo Hutchcraft, de nouveau, parle d’honnêteté. «En écoutant nos disques, vous pouvez vraiment savoir ce que nous ressentons à tel ou tel moment de notre vie. Nous utilisons la musique pour exprimer certaines parties de nous-mêmes.» La musique comme thérapie, c’est ce qui vient en tête lorsqu’on entend Adam Anderson ajouter que «c’est une libération lorsqu’une chanson sort».
«Surrender». De Hurts. Columbia/Sony Music. En concert le 22 février 2016 à Zurich (Maag Halle).