La Vaudoise Corinne Desarzens est une voyageuse gourmande et insatiable. Elle est aussi familière des Grisons, du Japon ou de la Russie, dont elle a appris les langues respectives, que de l’Ethiopie, où elle possède une maison. La voici qui revient de dix jours passés en Arménie, un carnet de dessins sous le bras. On la découvre très bonne illustratrice, maniant aquarelle et crayons avec art. Ce n’est pas du dilettantisme, c’est plus grave. L’Arménie l’a sauvée d’un moment de découragement, d’une envie de «sauter dans le vide».
Dans ce Carnet d’Arménie, le monde devient un livre à déchiffrer. Tout est écriture. C’est ce que la romancière tenait à nous dire, et elle l’a fait par le biais de dessins. «La pittura è cosa mentale», la peinture est chose de l’esprit, écrivait Léonard de Vinci. Avec Desarzens aussi, le dessin pense, il «comprend». Il permet de saisir ce qui irradie, des objets et du monde, de protéger, de recueillir. Un acte à la fois de protection et d’amour. Visages, paysages, troupeaux de moutons, «cul vert des vaches d’Arménie», angélique au parfum d’anis, mont Ararat, galette «lavash»… L’auteure a tout croqué avec sa plume et ses pinceaux. En petites touches, elle a composé un livre sur la beauté et le rapport à l’autre. «Je n’aime en toi que ce qui me distingue de toi.»
«Carnet d’Arménie». De Corinne Desarzens. Ed. de L’Aire, 86 p.