Bande dessinée. A Lausanne, le festival BD-FIL célèbre Mickey et Hugo Pratt. L’occasion aussi pour de petits éditeurs de présenter leur travail, à l’instar d’Hélice Hélas, qui publie «O2».
Pour sa première année à la tête du festival BD-FIL, Dominique Radrizzani, qui a dirigé le Musée Jenisch de Vevey de 2004 à 2012, propose une édition copieuse, avec Blutch en invité d’honneur et de nombreuses expositions mettant en lumière le travail de Riad Sattouf et Alex Baladi, célébrant les 20 ans de la disparition de l’immense Hugo Pratt ou réinventant la figure de Mickey. Créateur en 2005 du Centre national du dessin, il lance également, en coédition avec Noir sur Blanc, Bédéphile, une épaisse revue qui accompagnera chaque année la manifestation et propose notamment dans son premier numéro une belle étude sur la collaboration de Blutch avec Alain Resnais.
Alors que la rentrée BD bat son plein, avec un total de 31 albums locomotives qui dépasseront d’ici à fin novembre un premier tirage de 100 000 exemplaires, le festival lausannois permet également à de petits éditeurs indépendants de présenter leur travail. Hélice Hélas, petite structure veveysanne active aussi bien en littérature qu’en bande dessinée, présente par exemple O2, un audacieux récit graphique du Vaudois Krum, présenté comme «une trilogie contemplative, une histoire de nature et de rêves».
A la fois tout et rien sont dans cette définition. Certes, il y a dans O2 une histoire de nature et de rêves. Mais celle-ci est diffuse, allusive, difficile à cerner. On y découvre, dans des décors qui évoquent autant Mœbius que Miyazaki, une jeune fille en perdition dans une montgolfière rétro-futuriste, un homme chevauchant un escargot géant ou encore une mystérieuse pyramide d’où s’échappe un rayon lumineux.
Habile mise en abyme
A la lecture de ce récit, une question se pose: fallait-il dessiner tout cela uniquement au crayon, et tout en laissant apparaître les traits de construction? Un potentiel éditeur trouve qu’en effet ça fait un peu pas fini, tandis que l’auteur aime le côté vivant qui en découle. C’est là qu’O2 se révèle intéressant; dans une habile mise en abyme, Krum fait de son récit une histoire dans l’histoire: celle d’un dessinateur, Fred, son évident alter ego, en proie au doute. Vers la fin de l’album, Fred semble d’ailleurs comme happé par ce qu’il dessine… On a hâte de connaître la suite de ce projet autoréflexif qui est aussi un bel hommage à ce qui se faisait dans les années 70-80 en matière de science-fiction.
«O2». De Krum. Ed. Hélice Hélas, 112 p.
BD-FIL. Lausanne. Du 10 au 13 septembre. www.bdfil.ch
Dans le cadre du festival off, la Galerie Christopher Gerber expose les planches originales de Krum. www.christophergerber.com