Festival. Avant de célébrer l’an prochain ses 70 ans, la manifestation ouvre la porte à plusieurs interprètes sur la rampe de lancement de leur carrière: opération découverte et séduction.
Il y a bien sûr des pianistes confirmés, comme Mikhaïl Pletnev ou encore Ivo Pogorelich. Il y a aussi, et surtout, des interprètes à découvrir. Le programme du Septembre musical mentionnait à plusieurs reprises, plutôt qu’un nom de soliste, «lauréat du…». Des têtes d’affiche de concerts symphoniques ou de récitals qui sont entre-temps connues: elles viennent de se distinguer lors des finales du Concours Tchaïkovski 2015 ou du Concours Géza Anda, qui se déroulait en juin à Zurich. Sans oublier la finale du Concours Clara Haskil qui, intégrée au festival, révélera aussi des personnalités à suivre. C’est dire que l’affiche 2015, riche en rendez-vous coups de cœur, reflète quasi en temps réel la scène musicale internationale en devenir.
Directeur de la manifestation, Tobias Richter explique les raisons de ces choix ouverts: «Je prends évidemment en compte l’exigence du concours auquel je m’associe, tant au niveau technique qu’artistique, je m’assure que les jurés partagent les mêmes valeurs que moi, et je ne me limite pas à inviter les 1er prix! Les finalistes de ces sélections possèdent un très haut niveau d’excellence et sont tous dignes de grandes carrières: je programme donc la personnalité qui conviendra le mieux au programme de concerts préalablement élaboré avec l’orchestre et son chef.» Quitte à assouplir quelques règles.
Rencontre avec une nouvelle génération
Emblématique de cette option, Lukas Geniusas a obtenu le mois passé le deuxième prix Tchaïkovski. Et il a totalement bluffé Tobias Richter par ses options et sa personnalité artistique. Mais le jeune homme n’a pas (encore?) à son répertoire le Cinquième concerto de Saint-Saëns initialement prévu. Qu’importe: Saint-Saëns se voit reporté d’une année et Lukas Geniusas jouera le Deuxième de Tchaïkovski. Voici un des seuls inconvénients, minime, mentionné par Tobias Richter quand on lui demande les risques qu’il prend en jouant ce rôle de relais: «L’autre risque est celui que l’artiste ne soit pas disponible à la date prévue…» Les véritables risques, ce sont ces jeunes artistes qui les prennent: «Leurs calendriers se remplissent brusquement très vite, ils subissent des pressions et des sollicitations de toute part: le fait d’avoir tenu tout au long des épreuves de tels concours témoigne de leur résistance musicale et nerveuse, certes, mais ils ne sont pas à l’abri d’un passage à vide. Ils sont souvent plus vulnérables que les vieux loups de la scène musicale…»
L’autre lauréat à découvrir est Aleksandr Shaikin, deuxième prix Géza Anda, dans le Concerto de Gershwin puis en récital, lors du cycle de musique de chambre auquel sont invités les interprètes, d’ores et déjà bien sur orbite, Frank Dupree, piano, et l’étoile montante du violoncelle, le Français Edgar Moreau.
Tobias Richter l’affirme: les invités surprises du Septembre musical sont «au sommet de leurs potentialités artistiques». Et le directeur se dit «fier de les accueillir cette année et lors d’éditions futures», convaincu qu’une programmation associant des noms connus et des découvertes est appelée à interpeller le public. «L’occasion est donnée de faire connaissance avec cette nouvelle génération pour de vrai, et non pas par écran ou enregistrements interposés.» Une manière d’aller dans le sens de la marche, des nouvelles tendances d’interprétation… ou pas. Exactement comme à l’origine du festival lémanique, il y a soixante-neuf ans.
Montreux, Vevey, château de Chillon. Du je 27 août au je 10 septembre. www.septmus.ch
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