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Cinéma: s’il vous plaît, animez-moi un Petit Prince

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Jeudi, 23 Juillet, 2015 - 05:57

Adaptation. Il fallait du courage, ou de l’inconscience, pour s’attaquer au classique de Saint-Exupéry. Réalisateur de «Bob l’éponge» et de «Kung-fu Panda», Mark Osborne a osé.

C’est en toute logique que Le Petit Prince a été dévoilé en première mondiale, mais hors compétition, lors du dernier Festival de Cannes. L’occasion pour la manifestation de saluer un classique parmi les classiques de la littérature française, tout en déroulant le tapis rouge pour une production indigène… réalisée par un Américain. Car, oui, cette première adaptation animée du petit livre publié par le grand Antoine de Saint-Expuéry en 1943 est l’œuvre d’un Yankee. Et, disons-le d’emblée, ça se voit.

Comment faire pour rendre ce conte, délicieusement surréaliste et superbement onirique, attractif pour les familles et les gamins gavés à la 3D et aux dessins animés hyperrythmés? Réalisateur de Bob l’éponge et de Kung-fu Panda, Mark Osborne s’est, à n’en pas douter, posé cette question, avant d’arriver à la conclusion qu’il était difficile d’adapter le texte de l’écrivain et aviateur de manière littérale. Voici donc que l’histoire du Petit Prince n’est que l’élément clé d’un récit plus vaste ayant pour personnage central une préadolescente que sa mère prépare avec une rigueur militaire à devenir une adulte professionnellement redoutable.

Afin de se rapprocher de la Werth Academy, une petite fille – on ne connaîtra pas son nom – et sa maman emménagent dans une maison comme il y en a des centaines dans cette banlieue pavillonnaire au plan urbanistique tout en perpendiculaires. Et dont tous les habitants sont Blancs, le seul personnage de couleur étant un policier – on se croirait pour le coup dans une série policière des années 80. A côté de la maison sans âme qui va servir de prison à la fillette, dont l’emploi du temps estival consiste à travailler sans répit, une bicoque biscornue est habitée par un vieil excentrique à barbe. Il fut aviateur et a, un jour, dans le désert, rencontré un petit garçon qui voulait qu’il lui dessine un mouton. Nous y voici enfin!

3D et figurines de papier

L’homme veut raconter son histoire à la petite fille; elle ne veut pas mais va, finalement, être intriguée puis bouleversée par son récit. Afin de souligner le caractère patrimonial et quasi sacré du Petit Prince, Osborne a opté pour une animation en image par image de délicates figurines en papier mâché, tandis que le monde de la petite héroïne est en images de synthèse. De même, il oppose à la banlieue grise et peuplée de pigeons le jardin luxuriant et habité d’oiseaux multicolores de l’aviateur. Un tel manque d’originalité laisse pantois, de même que le rythme haché du film, qui ne décolle jamais et va jusqu’à utiliser du Charles Trenet pour la nostalgie francophile.

Jugeant visiblement le récit de Saint-Exupéry trop bref et trop onirique, Osborne n’en a gardé que l’essentiel, supprimant tout ce qui fait sa magie et rendant les personnages secondaires, tel le renard, quasi inexistants. Avant de rajouter un final affligeant que l’on n’ira quand même pas jusqu’à dévoiler, mais dont on peut dire qu’il parle du syndrome de Peter Pan et du danger de grandir en oubliant son âme d’enfant.

Tout ce qu’on peut espérer, en soupirant qu’un si beau texte soit devenu un film si kitsch, c’est qu’une nouvelle génération ait envie de lire Saint-Exupéry et de rêver avec lui. Si cette production sans audace servait à cela, elle aurait au moins une utilité. Mais, face à l’invasion programmée des Minions, ce Petit Prince exsangue risque bien de passer quelque peu inaperçu.

«Le Petit Prince». De Mark Osborne. France, 1 h 48. Sortie le 5 août.

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