Aux abords de Solaris, planète recouverte d’un océan lui tenant lieu de cerveau et d’inquiétante intelligence, quelques humains– scientifiques déboussolés, psychologue tourmenté confronté à la figure de son épouse défunte qui lui réapparaît – tentent d’en percer le mystère.
Publié en 1961, le roman de Stanislas Lem continue d’inspirer les créateurs, bien après Andreï Tarkovski, qui l’adaptait au cinéma en 1972.
Ainsi, fruit d’une commande de plusieurs institutions (dont le Théâtre des Champs-Elysées, le Centre Pompidou, l’Opéra de Lille et l’Opéra de Lausanne), le chorégraphe Saburo Teshigawara proposait au compositeur Dai Fujikura de concevoir un spectacle dans lequel danse et chant se répondent, se superposent, créent les effets de miroir aptes à saisir l’errance de personnages emmenés malgré eux sur un chemin initiatique inquiétant.
Dans un environnement scénique épuré, le récit de Solaris est ainsi raconté autant qu’incarné par des personnages dédoublés. La partition, servie par cinq solistes et l’Ensemble intercontemporain, sous la direction d’Erik Nielsen, est véritablement lyrique – les voix y dessinent des lignes pures et droites – et d’un grand raffinement sonore auquel s’ajoutent les effets de spatialisation conçus par le studio en informatique musicale de l’Ircam.
Les corps dansants, parmi lesquels Saburo Teshigawara et Nicolas Le Riche, ex-étoile de l’Opéra de Paris, servent une chorégraphie traversée d’élans frénétiques, de mouvements serrés d’une forte intensité dramatique.
Solaris ne livre aucun de ses secrets et renvoie chacun à sa propre méconnaissance de lui-même. Solaris, l’opéra dansé, promet en revanche des pistes d’émerveillement et de troubles à ne pas manquer.