Il a remercié beaucoup de monde. Ses partenaires à l’écran, le réalisateur, sa famille, sa compagne et même ceux qui n’avaient pas obtenu la récompense pour laquelle il était, lui, ce soir-là, monté sur la scène du Théâtre du Châtelet. C’était le 20 février dernier, et Pierre Niney recevait, peu avant de fêter son 26e anniversaire, le césar du meilleur acteur pour sa performance dans Yves Saint Laurent, de Jalil Lespert. Convenu, son discours était en adéquation avec le film pour lequel il était sacré, sorti quelques mois avant un autre biopic centré sur le destin du couturier disparu en 2008, mais autrement plus inspiré: Saint Laurent, de l’esthète Bertrand Bonello.
Il y a quelques semaines, on apprenait que Pierre Niney avait démissionné, avant même la cérémonie, de la Comédie-Française, dont il était pensionnaire depuis un peu plus de quatre ans. Pour se concentrer sur le cinéma. Et voici qu’on le découvre dans un thriller psychologique, Un homme idéal, loin d’être enthousiasmant. Il y incarne Mathieu, un jeune homme ambitieux se rêvant romancier alors qu’il n’a guère de talent pour l’écriture. Mais en signant de son nom le journal d’un vétéran de la guerre d’Algérie décédé, voici qu’il devient la coqueluche du Tout-Paris littéraire et médiatique, et séduit sans peine une belle intellectuelle qui se trouve être aussi une riche héritière. Mais comment garder le secret de son imposture lorsqu’on est incapable d’écrire le second roman que tout le monde attend?
Il y a dans «Un homme idéal» un suspense qui rappelle Boileau-Narcejac et Hitchcock, doublé d’une atmosphère – la mer, le soleil – qui évoque ostensiblement Plein soleil, fameuse adaptation d’un polar de Patricia Highsmith par René Clément. Si ce n’est que Yann Gozlan, qui signe là son second long métrage, est au cinéma de genre ce que Mathieu est à la littérature. Il n’a guère d’inspiration. Son scénario patine, multiplie les invraisemblances et finit par amuser là où on devrait frémir.
Voici Mathieu pris dans une spirale infernale, poussant Pierre Niney, mal dirigé, a en faire des tonnes, alors qu’on le sait capable d’autrement plus de subtilité, à l’image de sa délicieuse apparition dans Les neiges du Kilimandjaro, de Robert Guédiguian. Il a moins de quinze films à son actif, un césar aussi, donc, et souhaite s’éloigner des planches pour se consacrer au cinéma. A lui, dès lors, de bien choisir ses rôles et d’éviter une telle pantalonnade. Tout en espérant qu’un cinéaste de la trempe de Bonello fasse appel à lui, car il mérite mieux que la plupart des rôles dans lesquels on l’a vu jusqu’ici.
«Un homme idéal». De Yann Gozlan. Avec Pierre Niney, Ana Girardot, André Marcon et Thibault Vinçon. France, 1 h 37.