Par Fabrice Eschmann
En 1967, le Centre électronique horloger de Neuchâtel présentait devant le monde ébahi le Bêta 1, premier mouvement à quartz de l’histoire. Pour ne pas avoir su lire en lui l’avenir, l’industrie horlogère suisse allait connaître, quelque temps plus tard, sa plus grave crise, perdant des milliers d’emplois. La suite, tout le monde la connaît: le succès planétaire de la Swatch allait, quinze ans après, ressusciter un secteur moribond. Malgré tout, la montre à quartz va, pendant des décennies, être confinée à un rôle subalterne, à des pièces «fashion bon marché» ou «féminines très pratiques». La vitrine de la bienfacture helvétique, c’est, depuis les années 90, la mécanique et son flot d’émotions.
Ce traumatisme, ce tabou, qui empêchait les horlogers tout comme les designers de s’approprier le quartz pour en faire des produits techniquement et graphiquement intéressants, est en train de tomber. Louis Erard fut, en 2012, l’une des premières marques traditionnelles à se lancer dans ce créneau en proposant ses pièces Héritage. En 2014, c’est la très luxueuse F.P. Journe qui créait l’émoi en présentant une montre à quartz féminine auréolée d’un véritable développement fonctionnel.
Et Baselworld 2015 semble confirmer cette reconquête: Maurice Lacroix revient avec des Eliros aux lignes sport chic; Tissot ose une Vintage en or à plus de 2000 francs; mais surtout, Certina surprend en présentant la DS-8 Moon Phase, un chronographe phases de Lune qui passerait sans problème pour une montre mécanique sans la mention Precidrive sur le cadran. D’aussi loin que porte ma mémoire, c’est du jamais vu…