Roman. L’écrivain Roland Jaccard, 73 ans, et Marie Céhère, 23 ans, publient avec «Une liaison dangereuse» le récit de leurs amours au parfum de scandale.
Marie a 20 ans, une frange brune, des envies de mourir. Littérature, lolitas asiatiques et obsessions suicidaires constituent depuis quelques décennies l’essentiel de la vie de Roland Jaccard, délicieux Lausannois exilé à Paris, d’où il a œuvré comme éditeur aux Presses universitaires de France tout en publiant des récits idolâtrant Louise Brooks, Sigmund Freud ou Emil Cioran.
Pour le meilleur et pour le pire, ils se sont rencontrés, se sont plu, et ne se quittent plus. Babydoll lyonnaise solitaire, cinéphile et suicidaire, Marie passe une soirée à rire aux larmes en regardant les vidéos décalées que Roland Jaccard poste quasi chaque jour sur YouTube et Facebook (et sur le site de L’Hebdo).
Le 24 avril 2014, elle lui envoie un message – «Je vous aborde. J’aime bien vos vidéos, je les regarde tous les jours, c’est ma gazette.» Le 25 avril, il lui répond: «Une drôle de gazette pour une drôle de fille!» Une drôle d’histoire débute. Malgré – ou à cause de – sa réputation de «dragueur des piscines» et ses cinquante ans de plus, il est «tout à fait» son genre – «sourire éclaboussant de bonté», «mains d’homme du monde mal rangées dans les poches de son jean».
La différence d’âge? Elle n’en a rien à faire – «Les âmes ne vieillissent pas» –, il a l’habitude. Le vouvoiement austère qu’elle impose s’effrite. Durant des semaines, à midi ou à minuit, ils conversent par mail, mêlent badinage et confessions désespérées, jeux de mots et citations savantes, Adriano Celentano et Albert Caraco, frère turc de Cioran, se vampirisant l’un l’autre avec une excitante langueur. «Ma crédulité est sans limites.
Ma vanité aussi», avoue Jaccard. Emouvant et intemporel, hardi et romantique, scandaleux mais si peu provocant, Une liaison dangereuse raconte à deux voix, alternant messages électroniques et prose, cette chose rare à laquelle on serait idiot de résister: une histoire d’amour.
«Une liaison dangereuse». De Roland Jaccard et Marie Céhère. L’Editeur, 150 p.