Comment communiquer lorsqu’on est non seulement sourde et muette, mais aussi aveugle? Marie est enfermée dans son corps, seule dans le silence et la nuit. Impossible d’imaginer ce qu’elle ressent. Mais pas question pour ses parents de l’enfermer dans un asile, car elle n’est pas folle. Impossible pour eux, en revanche, de lui apporter l’attention qu’elle demande. Cette attention, Marie l’a recevra de Marguerite, une religieuse vivant dans une congrégation qui recueille des enfants sourds. Pétrie de doutes, Marguerite semble avoir trouvé sa mission, enfin. L’arrivée de Marie est une révélation. Pourtant, apprendre le langage des signes à une aveugle qu’elle devra finalement arracher de force à ses parents est un défi qui va lui demander une abnégation totale.
L’histoire de ces deux femmes est vraie. Elle s’est déroulée dans la France de la fin du XIXe siècle. Il y a dans leur rencontre quelque chose d’évidemment profondément émouvant. Beau défi pour un cinéaste que de la raconter, tant il est difficile de rendre compte par l’image de ce qui peut se passer dans le cerveau d’une jeune fille incapable d’entendre, de parler et de voir. Que faire? Un drame tendant vers une certaine forme de réalisme, ou un mélodrame appuyant chaque émotion? Jean-Pierre Améris s’est visiblement posé ces questions, mais a malheureusement fini par ne pas y répondre.
Il y a dans son film de beaux moments, comme lorsque Marie, réchauffée par la lumière du soleil, tente d’attraper ses rayons, ou lorsqu’elle retrouve ses parents. Ce que l’on retient surtout, c’est l’incapacité du réalisateur à faire sortir son récit des rails, ou encore ces passages fort laborieux, telle cette séquence d’une pénible lourdeur pendant laquelle Marie apprend enfin son premier mot.
«Marie Heurtin». De Jean-Pierre Améris. Avec Isabelle Carré et Ariana Rivoire. France, 1 h 38.