Trajectoire. Fer de lance du mouvement «shoegaze», devenu culte après sa séparation il y a près de vingt ans, le groupe anglais se reforme pour une tournée événement qui passe par Genève.
Londres, fin des années 90. Après une décennie de domination new wave, les clubs voient débarquer une armada de jeunes groupes ayant en commun un goût prononcé pour les guitares noisy et les mélodies psychédéliques. Des groupes qui sont aussi plus enclins à regarder leurs pédales à effets qu’à blaguer avec le public. Il n’en faut pas plus pour que la presse spécialisée, toujours prompte à dégainer un néologisme, parle de shoegaze. Ou l’art de regarder ses pompes.
Parmi les formations phares de cette scène émergente, on trouve Ride, Pale Saints ou encore Slowdive. Avec, en guise de figure tutélaire, My Bloody Valentine, dont l’album Isn’t Anything, sorti en 1988, sera considéré comme «le» manifeste shoegaze.
Neurasthénie
C’est à Reading, en 1989, que Neil Halstead et Rachel Goswell décident de former Slowdive. Ils sont tous deux chanteurs et guitaristes, se connaissent depuis l’enfance et commencent par enregistrer une démo dans laquelle ils laissent parler leur goût des guitares bruyantes. Le groupe prend véritablement forme lorsque débarque un troisième guitariste, recruté par petite annonce, et qui sera bientôt suivi par un bassiste et un batteur. Sur la deuxième démo que Slowdive enregistre, le son s’affine un peu plus, les couches de guitares restent bien présentes, mais Halstead et Goswell tentent de dompter leurs velléités soniques en y greffant des mélodies éthérées, aériennes.
Alan McGee, le visionnaire patron du label Creation Records, qui sera peu après – bingo! – le premier à repérer Oasis, est séduit: il signe le quintet et publie en novembre 1990 son premier single, tout simplement intitulé Slowdive. Guitares abrasives, abus des distorsions, mélodie neurasthénique et voix perdues dans les limbes: les Anglais s’imposent, quelque part entre les mélodies plus pop de Ride et le tropisme mur du son de My Bloody Valentine. Ce premier enregistrement est favorablement accueilli et fait de Slowdive un nom à suivre. Las, l’album Just For A Day ne suscitera pas, dix mois plus tard, le même enthousiasme.
Le mouvement shoegaze, auquel on reproche un manque patent d’imagination et les mêmes mélodies répétées à l’infini, semble mort-né. Malgré un titre beau à se damner comme Alison, Souvlaki connaît le même sort en 1993. L’heure est à la britpop, Blur et Suede font danser les foules, mais le groupe refuse de rendre les armes et enregistre encore un troisième album, le plus expérimental Pygmalion, qui précipitera sa chute.
Nouvel album en vue
Quelques mois à peine après la fin de Slowdive, en 1995, Halstead et Goswell débranchent leurs pédales à effets, virent acoustiques et reviennent avec Mojave 3, plus orienté country-folk. Les années passent, la britpop s’étiole à son tour, et monte une nouvelle génération de musiciens qui se réclame du shoegaze et de Slowdive. Le groupe acquiert alors une réputation culte. Au point que ses membres fondateurs se disent qu’enregistrer un quatrième album serait peut-être une bonne idée. C’est d’ailleurs à cela que sert la tournée de reformation qui passe par le festival genevois de La Bâtie: se remettre sur les rails avant de rentrer en studio. Pas de nostalgie chez Slowdive, mais une saine envie d’aller de l’avant, de proposer de nouvelles choses. Comme au bon vieux temps…
La Bâtie, Genève. Jusqu’au 13 sept. Concert de Slowdive le 9 à 21 h 30, Maison communale de Plainpalais. www.batie.ch