Concert. Dans sa belle tradition de rencontres rares, le festival Luna Classics, qui déménage à Nyon, propose notamment deux nuits entre jazz et bel canto, avec Dee Dee Bridgewater et Ruggero Raimondi.
Au téléphone depuis Koreatown, Los Angeles, Miss Dee rit. Elle rit beaucoup, Dee Dee Bridgewater, avec cette pudeur dans la voix qui est celle de sa chaleureuse gouaille optimiste. «Je vivais en France depuis des années, mais j’ai dû revenir en Californie pour pouvoir m’occuper de ma mère, qui est malade. Et je suis encore en plein déménagement», raconte-t-elle alors que l’on s’affaire avec des meubles derrière elle. Le Vieux Continent lui manque, cependant. «Je me sens très Européenne. Aux USA, je suis moins à l’aise.» Elle vient de participer à deux concerts dans l’enceinte sublime du Hollywood Bowl, pour des hommages à Ella Fitzgerald, mais se réjouit de refranchir l’Atlantique.
L’idée d’une rencontre avec Ruggero Raimondi est venue de Hazeline Van Swaay Hoog. Toujours à la recherche d’idées inédites, l’audacieuse fondatrice et directrice du festival Luna Classics leur a proposé de chanter ensemble, deux soirs de suite, pour la première fois. «J’ai hésité, regardé ce qu’il avait chanté à travers sa carrière, j’ai fini par dire oui», explique la chanteuse du Michigan. «Je connais relativement peu la musique classique, confesse-t-elle. Bien sûr, il y a eu Carmen Jazz ou Gershwin que j’ai évidemment chanté, mais ce que nous allons pouvoir faire ensemble sur scène dépendra d’abord de ce qu’il pourra interpréter. J’ai vu que Ruggero aimait par exemple beaucoup certaines mélodies de Broadway.» Le merveilleux baryton-basse de Bologne leur a même consacré un album entier à la fin des années 80.
Déménagement à nyon
Leur rencontre sera l’un des points d’orgue du neuvième Luna Classics, qui vit un chambardement. Trop à l’étroit au centre de Saint-Prex, le festival a dû se résoudre à déménager: c’est désormais sur la place du Château, à Nyon, que se déploie l’étonnant et merveilleux chapiteau Luna. La ville de Nyon s’est montrée enthousiaste. «Nos concerts ont cependant lieu durant la même période que le Festival des arts vivants, ce qui a provoqué de légitimes questions, explique la directrice. Mais nous nous sommes rencontrés et, cette année, on ne pouvait pas faire autrement. Je crois aussi que nous pourrions avoir une bonne surprise pour les deux manifestations: la curiosité peut générer des synergies entre les publics. On fera un bilan à la fin.»
Cette année, Luna accueillera aussi, notamment, Maxime Vengerov, Gary Burton ou encore l’habitué du festival Nigel Kennedy pour un duo attendu avec Jean-Luc Ponty.
Pour celui entre Dee Dee Bridgewater et Ruggero Raimondi, le répertoire final se décidera durant les répétitions. «All the Things You Are, The Shadow of Your Smile… Il y a plein de possibilités, explique Dee Dee. Il ne swingue pas, et c’est assez aisé pour moi de m’adapter au fur et à mesure, de mettre un peu de folie.» La folie et la joie: elle sait faire ça, et ces deux nuits seront bleues.
Concerts les 22 et 23 août à 20 h 45.Programme complet et billetterie sur www.luna-classics.com
