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Alors on danse: Fauve, par-dessus tout

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Jeudi, 17 Juillet, 2014 - 05:58

Je n’ai jamais considéré la musique comme seulement du divertissement, du futile, un truc pour danser ou du fun. Je ne crois pas plus aux différences de genre: pour moi, Stevie Wonder est aussi estimable et génial que Schubert ou Debussy, Ellington aussi décisif que Beethoven, J. J. Cale vaut bien Erik Satie, Billie Holiday sera plus éternelle que Barbara Hendricks, j’écris cela sans la moindre envie de provocation.

Je vais depuis trente ans au Montreux Jazz Festival pour entendre des idoles anciennes ou actuelles, découvrir, faire le curieux ou l’habitué. Mais je préférerai toujours les curieux aux habitués. Surtout, j’y vais pour tenter de saisir la vibration, un déhanchement du monde alentour. C’est grandiloquent, mais je me moque de l’être: oui, je crois à la musique en avant-poste, en précipité chimique, social, politique, historique. Je crois aux foules heureuses ou étonnées devant une chanson ou un rythme, et disant plus que le bonheur de la chanson ou du rythme.

Ça va finir, Montreux 2014. Jamie Cullum a été extraordinaire de la première à la dernière seconde. Stephan Eicher a été immense et généreux. Pharrell Williams n’est toujours pas un showman et je ne vais pas en rajouter ou jouer les étonnés. Mais j’espérais évidemment mieux: plus long, plus de tension, plus de fête. Pharrell est un miraculeux artiste de studio, je continue de l’adorer, mais bon, il m’a un peu déçu, sur le coup.

Mais, par surprise, il y a eu quelques minutes sidérantes. Après Eicher, je suis descendu voir la fin du concert de Fauve, ce collectif français poético-rap-rock qui a commencé à remplir les salles il y a quelques mois, sans avoir alors même sorti un disque, pratiquement sur la seule force du bouche à oreille. J’avais écouté depuis, et je trouvais ça surévalué, un peu ado ou démago. Mais là, en scène, j’ai été estomaqué par ces types, par l’ambiance, la folie tous ensemble, par la ferveur absolue, par la foule main tendue, avec eux. Fauve ne s’adressait pas du tout à moi, je suis terriblement trop vieux pour cette révolte-là, mais ils m’ont déchiré le cœur par leur incroyable envie de cœur. Ils m’ont bouleversé parce qu’ils étaient à fond dedans. Une musique frère, une baston poésie, arme ou bouclier: une musique nécessaire et utile. Fauve, par-dessus tout, c’est maintenant.

christophe.passer@hebdo.ch

 

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