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François Berthoud, au service de Sa Majesté la mode

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Jeudi, 26 Juin, 2014 - 05:56

Zoom. Il travaille pour Chanel, Prada ou «Vogue». Légende du dessin de mode, le Suisse François Berthoud voit son œuvre exposée au Musée des beaux-arts du Locle.

A l’époque d’Instagram, des vidéos postées en plein défilé sur Twitter ou Facebook, il existe une poignée d’hommes qui immortalisent la mode à un rythme lent, très lent, avec des outils d’autrefois. Aquarelle, crayons, poinçons, laque et huile, émail. Un travail d’orfèvre. Dans la profession, ils sont choyés et appelés par les plus grands, Karl (Lagerfeld) ou Anna (Wintour), pour faire la promotion ou l’illustration d’un vêtement, d’un parfum, d’une personnalité. Dans le grand public, leurs noms sont inconnus. On a déjà du mal à identifier les grands créateurs de chiffons, à distinguer un Raf Simons d’un Haider Ackermann. Alors que dire des hommes de l’ombre, des métiers obscurs… Le Musée des beaux-arts du Locle s’illustre en présentant, dès dimanche, le travail de l’un d’entre eux. Car l’un de ces trois ou quatre mousquetaires, fidèles serviteurs de la reine mode, est un Suisse, enfant du Locle.

Carte de visite inutile

Il s’appelle François Berthoud. A 53 ans, il est un des rares illustrateurs de mode. Rares signifiant talentueux. Une légende. Dans le monde, il a pour collègues Ruben Toledo, New-Yorkais d’origine cubaine, et Mats Gustafson, Suédois. Le Français Jean-Philippe Delhomme aussi, et quelques Anglais. Depuis plus de trente ans, puisqu’il a démarré à Milan en 1982 après son école d’arts graphiques à Lausanne, François Berthoud travaille sur commande. «Des stimulations plutôt que des restrictions», sourit l’artiste, au téléphone, depuis son atelier high-tech de Zurich. Il publie régulièrement dans la crème des magazines américains: Vogue, Harper’s Bazaar, The New Yorker, The New York Times Magazine. Pour les Vogue italien et japonais aussi. Le must. A ce niveau-là, carte de visite inutile.

Le dessin ci-contre, Balmain 2013, fait partie d’une commande d’une quinzaine de dessins, passée par le magazine allemand Stern. Dans le jargon, c’est un «rédactionnel», un portfolio de mode que le journal a l’habitude de publier une ou deux fois par an. «Stern a préféré cette fois une histoire racontée en dessins plutôt qu’en photos. Cela donne de l’oxygène, constate Berthoud. On reproduit beaucoup de photos, avec une grande tolérance vis-à-vis des images médiocres. Tandis qu’il n’y a que les très beaux dessins qui peuvent passer.»

Et durer. «Dans le passé, seuls les très bons illustrateurs de mode ont pu avoir un récit cohérent sur plusieurs années. C’est très exigeant», note l’artiste. On pense notamment à René Gruau (1909-2004) et ses esquisses, ses croquis pour Christian Dior et la haute couture d’après-guerre. Depuis trente ans, François Berthoud a le trait intemporel, et c’est aussi ce qui justifie son entrée au musée. Et la place du dessin de mode aux beaux-arts. Qu’il croque un escarpin Chanel ou un parfum Prada, qu’il trace le portrait des grands du royaume (Christian Lacroix, Marc Jacobs, Karl Lagerfeld, sur son site internet www.francoisberthoud.com), il en fait des images iconiques, qui tendent à se fixer pour toujours. On peut y voir un esprit Warhol très plaisant. Berthoud travaille à la fois avec des outils ancestraux (gravure, pinceaux), actuels (C-Print, tirage photographique sur papier chromogène) et technologie numérique. Il dit aimer quand la technique amène quelque chose qu’il n’a pas voulu. Que cela amène de la vie. A cette mode parfois si stéréotypée, si figée.

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GIRL SITTING, 2003, laque et huile sur papier françois berthoud
Balmain Fress, 2013, c-print on t-bond françois berthoud
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