Le chef grecapparaît comme la réincarnation de Mozart et de ses facettes créatives, dans des «Nozze» qu’il fait revivre avec une acuité intègre.
opéra L’histoire de l’interprétation est jalonnée de chocs salutaires, ces moments où un interprète réinvente les élans et le relief d’une musique que l’on connaissait déjà. Le chef Teodor Currentzis, ses orchestre et chœur Music-Aeterna ainsi que des chanteurs acquis à sa cause se sont isolés en studio, dans la ville de Perm, à 1400 kilomètres à l’est de Moscou, pour mûrir et offrir cet enregistrement des Nozze di Figaro qui sera suivi de Così fan tutte cet automne et de Don Giovanni l’an prochain.
Le déroulement de l’opéra est aussi captivant à l’écoute qu’il pourrait l’être sur scène: chaque récitatif amène d’une manière ciblée et spécifique l’air qui le suit, grâce à un continuo d’une rare intelligence. Les voix et les instruments participent continuellement d’une même énergie, partagent les émotions et les passions au point qu’on ne sait pas toujours qui est voix ou qui est instrument.
Ces «noces de timbres» sont le résultat d’une manière de chanter voulue par le chef: les voix, évidemment travaillées, sonnent pourtant naturelles, allégées de tout vibrato superflu, à la baroque. L’auditeur se retrouve au cœur des êtres, de leurs affects; il les écoute, partage avec eux la vaste palette de leurs émotions, en toute intimité. Comme le font les instruments de l’orchestre. C’est bouleversant et tout autant – merci Mozart! – jubilatoire. On se surprend à participer à ces Noces de l’intérieur. Ce cadeau sortant de l’ordinaire est signé Currentzis, alias Mozart.
«Le Nozze di Figaro». Avec MusicAeterna. Sony Music. Egalement en Blu-ray haute définition.