Au début, on pensait que ses œuvres manquaient de silence. Comme s’il y avait quelque chose de trop beau dans les compositions du peintre chinois Zao Wou-Ki (1920-2013), installé à Dully (VD) à la fin de sa vie et exposé en ce moment au Musée d’art de Pully. L’œil cherchait le geste venu des tripes mais se trouvait retenu par des compositions élaborées et léchées.
Zao Wou-Ki est arrivé en France en 1949 et il a été très tôt fasciné par Paul Klee. On voit l’influence du Suisse dans les œuvres des années 50, parfois décoratives. C’est son abstraction qui fera florès dans le Montparnasse des années 50, et dans l’Amérique des années 60, qu’il visite aux côtés de son ami Pierre Soulage. Les grands formats peints ne sont pas présentés à Pully. La surprise et l’enthousiasme viennent ici de l’œuvre gravée (lithographies, eaux-fortes), des aquarelles et des encres, autant de collaborations à de somptueux livres de bibliophilie pour illustrer poètes et écrivains, souvent de ses amis: Henri Michaux, Philippe Jaccottet, Yves Bonnefoy, André Malraux… Ses Illuminations de Rimbaud sont impressionnantes. «Je voulais peindre ce qui ne se voit pas, le souffle de la vie, le vent, le mouvement, la vie des formes, l’éclosion des couleurs et leur fusion», disait Zao Wou-Ki.
L’œil du visiteur finit par s’imprégner de cette synthèse entre calligraphie chinoise et abstraction occidentale. Si bien qu’en sortant du Musée d’art de Pully, le ciel et même un graffiti sur un mur semblaient avoir été tracés par le pinceau de l’artiste.
Deux autres expositions lui seront consacrées cette année, à la Fondation Martin Bodmer de Cologny, dès le 4 décembre, et à la Fondation Gianadda, dès le 5 décembre.