Né en 1926 en Transylvanie, Kurtág est aujourd’hui encore l’un des piliers de la musique hongroise et a partagé, avec son illustre aîné Bartók, la passion des musiques populaires, sources d’inspiration, et l’engagement pédagogique. Bartók composait les Mikrokosmos, Kurtág a composé des jeux pour piano, ses Jatekok.
C’est donc naturellement que l’Ensemble Contrechamps, qui consacre deux soirées à Kurtág, invite des élèves du Conservatoire populaire à interpréter ces pages concises et ludiques en préambule aux récentes transcriptions pour ensemble qu’en a faites le chef suisse Olivier Cuendet, à la demande du compositeur hongrois.
Autre découverte au programme, la transcription de… concertante…, pièce pour orchestre «gigantesque», qu’Olivier Cuendet propose ici pour orchestre de chambre et deux solistes, Hiromi Kikuchi, violon, et Ken Hakii, alto, dédicataires de l’œuvre qui date de 2003. On y retrouve la notion spatiale de la musique selon Kurtág.
Les instruments et le public ne sont en effet pas dans une relation frontale: ils cohabitent, établissent un dialogue, partagent les sons, leur cheminement ainsi que l’aventure collective du concert.
Grand connaisseur de Kurtág, le musicologue Philippe Albèra insiste sur la parenté entre Kafka et ce compositeur de métamorphoses, citant une phrase emblématique de leur attitude artistique: «Il existe un but mais pas de chemin; ce que nous appelons chemin, c’est l’hésitation.» Cette hésitation fertile n’est ni faiblesse ni mollesse.
Elle est une appropriation de l’espace, une écoute active de ce que la musique insuffle et la certitude que la vie de chacun, public et interprètes, interagit avec elle. Une histoire de partage.
