Le Bâlois Tom Ryser est un habitué de la mise en scène d’opéra, alors même qu’il donne avec verve autant dans les comédies musicales et le théâtre que dans les spectacles «clownesques» du duo alémanique Ursus & Nadeschkin, qui arpente la scène internationale depuis près de trente ans. Touche-à-tout, également acteur et chanteur lyrique, Tom Ryser connaît les ficelles des métiers et, de toute évidence, tient à les entrecroiser. Son Enlèvement au sérail propose un pacha Selim (qu’il incarne lui-même) en Occidental nostalgique exilé sur une terre lointaine, hanté par le souvenir d’une femme aux longs cheveux dont il se repasse des séquences heureuses filmées en super-8.
Son sérail est un «camp de base», entre tentures orientalisantes et soldats armés, dans lequel, en Barbe-Bleue méticuleux pacifique, en Pygmalion désabusé, il cherche à recréer son amoureuse disparue. Et c’est le jeune noble Belmonte, venu récupérer Constance tombée aux mains de Selim, qui tient le rôle du Maure mozartien, homme issu d’un pays où les peaux sont noires. A partir de cette trame mozartienne redessinée, quasi inversée, Tom Ryser offre des moments cohérents et denses (l’opéra est long mais vaut la peine d’être écouté et regardé jusqu’au bout!), mais aussi quelques bouffonneries à l’humour répétitif qui, s’il est efficace au cirque, est ici un peu lassant. Beaucoup de mouvements et de bruits parasites: esquisses de danse à orthographier «dance», bruyants claquements de bottes. Mais l’équilibre entre chanteurs est bon, les personnalités bien campées. Jusqu’à se demander si la froideur précise et hautaine de Constance, incarnée par Maria Rey-Joly, ne serait pas voulue…
Fribourg, théâtre Equilibre. Ve 9, 19 h 30. Di 11, 17 h. www.operafribourg.ch Lausanne, Opéra. Ve 16, 20 h. Di 18, 17 h. www.opera-lausanne.ch