«Sukkwan Island», c’est une grande baffe que l’on prend en pleine figure. Le pire? On en redemande. En 2010, les Editions Gallmeister publiaient ce court roman de l’Américain David Vann, météorite écrite par un inconnu qui leur faisait remporter le Médicis étranger. Vendu à 200 000 exemplaires l’année de sa parution, ce huis clos sauvage entre un père et son fils adolescent qui décident de passer un an seuls sur un îlot en Alaska devient un best-seller inattendu. Miracle: son adaptation graphique par Ugo Bienvenu, jeune prodige français de la réalisation et du dessin, est à la hauteur de l’original. Le pari difficile qui lui a été lancé, soit adapter un roman taiseux, âpre, porté par deux personnages seulement et un paysage somptueux mais répétitif, est tenu. Souffle, terreur, oppression, dépression, amour, haine, tourmente familiale: son trait grave, gras et poétique s’approprie le drame avec empathie et une fausse innocence très convaincante.
«Sukkwan Island». D’Ugo Bienvenu. D’après le roman de David Vann. Denoël Graphic, 224 p.