Le plus délicieusement caustique des écrivains américano-lausannois s’attaque au genre policier. En tout cas, c’est ce que laisse croire en son début ce très drôle Le chemin de la dame, nouveau roman. Le pitch: au sortir d’un repas arrosé avec le directeur d’une école d’art, le rédacteur en chef d’un grand quotidien lausannois est retrouvé empalé sur un piquet de vigne dans le Dézaley. L’homme avait une assistante, qui était aussi son amante, et surtout son grand amour. Suicide ou accident? Les inspecteurs Glauser et Kaeslin mènent l’enquête, on rit beaucoup en lisant cette tragicomédie grinçante, qui permet d’abord à Jon Ferguson d’exprimer avec sa verve woodyallenienne une critique plutôt acerbe du monde des médias, et de l’idée philosophique de ce que recouvre le concept de vérité en un monde où l’info n’est qu’un produit dérivé.
Parti comme un polar classique, glissant vers un True Detective à la vaudoise (duo de flics nihilisto-désopilant), le roman oublie parfois son intrigue en cours de route. Mais ça ne fait rien, Ferguson adorant emmener son lecteur sur les chemins de traverse de la dérision chaleureuse et de la philo en utile condiment de la vie. Un roman très piquant, donc.
«Le chemin de la dame», Editions Hélice Hélas, 175 p.