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Marcus Signer: Goalie, c’est lui

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Jeudi, 17 Juillet, 2014 - 05:55

Portrait. Le comédien a reçu un Prix du cinéma suisse pour son interprétation de l’antihéros créé par Pedro Lenz dans son best-seller «Der Goalie bin ig». Mais il reste une énigme.

Il y a d’abord le roman, Der Goalie bin ig, devenu Faut quitter Schummertal! en français. Il a fait de son auteur, le Bernois Pedro Lenz, une star. Ecrit en dialecte, il raconte à la première personne les déboires de celui que l’on surnomme depuis l’enfance Goalie, le gardien de but. Il y a ensuite l’adaptation cinéma de ce best-seller. Elle a apporté à la réalisatrice Argovienne Sabine Boss quatre récompenses sur sept nominations lors de la dernière cérémonie des Prix du cinéma suisse, dont celles du meilleur film et du meilleur scénario. Mais aussi de la meilleure interprétation masculine pour Marcus Signer. Un sacre incontestable tant l’acteur ne donne pas l’impression d’incarner Goalie mais de faire littéralement corps avec ce personnage qui semble avoir été écrit pour lui.

«Goalie est un antihéros, un homme de bonne foi, un bavard naïf et fantaisiste, tout à l’opposé des ambitieux, qui réussissent et qui sont considérés aujourd’hui comme des modèles», dit Pedro Lenz de sa création. Après avoir purgé un an de prison pour avoir accepté d’aller récupérer un paquet à Pontarlier en échange de quelques centaines de francs, Goalie se rend peu à peu compte qu’il a été dupé par celui qu’il prenait pour son meilleur ami. Fidèle en amitié, ancien junkie en quête de rédemption et d’amour, il a payé cash sa loyauté.

Malice enfantine

Dès sa première apparition, Marcus Signer occupe tout l’écran. Silhouette massive mais gestes hésitants, regard perdu, improbable croisement de Droopy et John Lydon, il fait littéralement sien le personnage de Pedro Lenz, au point qu’on ne croit pas à un rôle de composition. «Il lui a donné une grande force, l’a rendu charmant, insistant, vulnérable et complexe», souligne le romancier.

Né à Berne en 1964, Marcus Signer se forme à l’art de la comédie dans les années 80 au sein de l’atelier Theater 1230, dont il est membre jusqu’en 1992. Il séjourne quelque temps à New York, mais c’est sur les planches, dans la capitale helvétique et aussi à Coire, qu’il débute vraiment. Il apparaît en même temps dans deux épisodes de la populaire série Tatort, ce qui le fait connaître d’un large public, tout en tournant au côté de Bruno Ganz Brandnacht, un thriller réalisé par Markus Fischer. Alors qu’une carrière cinématographique semble s’ouvrir à lui, il travaille encore deux fois sous la direction du cinéaste zurichois puis disparaît totalement des écrans pendant plus de dix ans. Avant de réapparaître en 2011 dans Mary & Johnny, de Samuel Schwarz.

Pour beaucoup, le Bernois reste une énigme. En février dernier, un journaliste du Tages-Anzeiger avait tenté de percer le mystère Signer, un homme imposant – il mesure environ 1 m 90 – qui «respire un mélange de supériorité intemporelle et de malice enfantine». Notre confrère zurichois n’apprendra finalement pas grand-chose, si ce n’est qu’il aurait bien aimé jouer James Dean dans un biopic sur le rebelle de Hollywood, ou bien Gandalf le Magicien. A lire l’article publié, on devine que l’acteur est du genre taiseux.

Loser pathétique

Pour en avoir le cœur net, L’Hebdo a également voulu partir à sa rencontre. A Berne, où pourquoi pas à Langenthal, ville d’origine de Pedro Lenz devenue Schummertal dans son roman. Mais, malgré toute la bonne volonté d’un attaché de presse zélé, pas trace de Signer. Aucune réponse, comme s’il voulait volontairement rester une énigme. Seule Sabine Boss assure la promotion romande du film. Dans le milieu du cinéma, il se murmure que le Bernois est en effet atypique, qu’il n’a pas toujours carburé à l’eau de source, d’où peut-être la facilité avec laquelle il a pu devenir Goalie, ce loser pathétique et agaçant dans sa manière de tout gâcher. Mais qu’il arrive malgré tout à nous rendre sympathique, signe de la grande finesse de son jeu.

Lorsque enfin il parvient à séduire Regula et à l’emmener en Espagne, Goalie réussira l’exploit de la laisser seule dans l’attente du repas promis, occupé qu’il est à picoler tout en jouant au baby-foot. Marcus Signer aurait un jour oublié de remonter sur scène pour les mêmes raisons. Il était fait pour devenir Goalie, pas de doute. A tel point qu’on se demande si une telle performance ne va pas le pousser à disparaître de nouveau des écrans. A fuir une célébrité dont il ne semble pas vouloir.

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