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Harlan Coben, sentimental serial thriller

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Jeudi, 13 Mars, 2014 - 05:59

Le romancier américain publie «Six ans déjà»,son 22e livre traduit en français depuis «Ne le dis à personne» en 2001. Mais pourquoi nous plaît-il autant?

Il est grand (1 m 94), il est sympa, il est doué. Et prolifique: Six ans déjà sort en français chez son éditeur Belfond alors que son tout nouveau roman, Missing You, sort en anglais le 18 mars. A découvert et A quelques secondes près, les deux premiers tomes de son excellente nouvelle trilogie pour jeunes adultes, paraissent en poche chez Pocket. Depuis Ne le dis à personne en 2001, son premier roman indépendant écrit après sept livres consacrés aux aventures de son (grand, 1 m 94) agent sportif Myron Bolitar, Harlan Coben, né le 4 janvier 1962 à Newark dans le New Jersey, est l’auteur à suspense le plus lu dans le monde.

Après les Etats-Unis, c’est en France, devant l’Angleterre, qu’il vend le plus de livres. Le Fleuve noir et Belfond se partagent le gâteau et fournissent aux lecteurs leur double dose de Coben annuelle. Il se sent à Paris «comme à la maison» et loge à l’hôtel rue Dauphine, à Saint-Germain-des-Prés, qu’il n’échangerait pour rien au monde contre un palace des Champs-Elysées.

«Six ans déjà» raconte l’histoire de Jake, prêt à tout pour retrouver celle qu’il aimait il y a six ans et qui a disparu depuis. Quel est le point de départ de ce roman?
Je voulais écrire une histoire d’amour. Je me suis demandé quelle était la scène la plus triste à laquelle je pouvais penser. J’ai imaginé cet homme, Jake, en train d’assister au mariage de la femme qu’il aime, Nathalie, avec un autre. C’est une scène qui brise le cœur.

Une fin heureuse, un happy end, fait-elle partie du contrat d’un auteur à succès avec ses lecteurs?
Mes livres n’ont pas toujours de happy end! Prenez Juste un regard: il finit mal. A mes yeux, une fin doit être satisfaisante, pas forcément heureuse. D’une part parce que je ne sais jamais comment le roman que j’écris va finir et que je tiens à avoir cette liberté jusqu’au bout. Et qu’est-ce que le bonheur, de toute façon? Le lecteur doit avoir la réponse à ses questions, c’est le principal. Que les mystères du livre soient résolus, que l’on ferme le livre avec la conviction que la vie continue, d’une manière ou d’une autre.

Tous les romans de Harlan Coben jouent sur l’identité réelle ou supposée des gens, la réalité qui nous entoure et n’est qu’apparence, sur les secrets du passé soudain révélés. Ce sont les ingrédients préférés de votre cuisine d’auteur?
J’aime écrire sur les personnes disparues. Les simples résolutions de meurtre à partir d’un cadavre réel ne m’intéressent pas. C’est qu’à mes yeux, l’espoir est essentiel. Celui de mes personnages, et donc celui de mes lecteurs. Si quelqu’un est mort, il est mort. On peut tenter de savoir qui l’a tué, lui rendre justice, mais c’est tout.

Si une personne est peut-être encore vivante, le désir profond qu’elle le soit crée de l’espoir. Et l’espoir est la chose la plus belle, mais aussi la plus terrible du monde. En tant qu’écrivain tout-puissant, je peux l’écraser, le piétiner, le décevoir, mais il sera toujours là à lutter et à emporter le cœur des lecteurs. Mon autre ingrédient préféré est le jeu sur l’identité des personnages. Personne n’est absolument celui qu’il dit être ou que les autres croient qu’il est. Nous pensons tous être plus complexes que les gens qui nous entourent, nous pensons savoir ce que l’autre pense. Nous nous cachons beaucoup de choses les uns aux autres, sciemment ou non.

Dans «Six ans déjà», l’amour joue du coup le rôle de l’espoir?
L’amour fait tourner le monde, comme disait l’autre. Une fois que Jake s’est mis en route pour retrouver Nathalie, rien ne peut l’arrêter. Ce qui le porte est autant l’amour que l’espoir. Je ne voulais pas devenir trop sentimental, j’aime que mes romans contiennent de l’humour, de l’ironie. Mais je me suis mis dans la peau de Jake, qui est un incurable romantique…

Ne me dites pas que vous ne l’êtes pas aussi, romantique!
Je suis marié depuis plus de vingt-cinq ans avec la même femme, et Paris est ma ville préférée, alors sans doute, oui!

Ressentez-vous en écrivant ce que vous souhaitez que le lecteur éprouve en lisant vos romans à suspense, ou restez-vous absolument froid?
C’est un mélange des deux. Je suis en train de terminer le troisième tome de ma série pour jeunes adultes mettant en scène le neveu de mon héros récurrent Myron Bolitar, Mickey. Dans ce tome, Mickey découvre enfin la vérité à propos de son père. Eh bien, je pleurais en écrivant cette scène. J’ai d’ailleurs écrit la fin du livre très vite, je voulais absolument savoir ce qui allait arriver, comme le lecteur qui lit à toute vitesse durant une nuit sans s’arrêter. Par contre, pour mes scènes de violence, j’évite les pistolets et le sang qui gicle, c’est trop convenu. Je distille une violence très grande mais intérieure, je décris ce qui se passe dans la tête des gens, l’angoisse. Mes scènes d’action ont moins d’action que de pensées intérieures, des ressentis, de stress. Je reste froid en les écrivant.

Depuis la parution de «Ne le dis à personne» en 2001, vous n’avez écrit que trois romans vous mettant dans la peau de votre héros récurrent, l’agent sportif et ex-basketteur Myron Bolitar. Vous manque-t-il?
Oui. J’y ai mis beaucoup de moi. Mais je n’ai jamais voulu que Myron soit un personnage sérieux et figé comme Hercule Poirot ou Sherlock Holmes, qui ne change jamais et passe son temps à résoudre des énigmes. La première fois que Myron apparaît, il a 27 ou 28 ans. Dans les livres les plus récents, il a la quarantaine, et une vie privée compliquée. Je ne peux pas continuer à le faire vieillir trop… De toute manière, les éditeurs me fichent une paix royale, car les Myron Bolitar se vendent aussi bien que les romans indépendants.

Pourquoi vous être lancé dans la littérature pour jeunes adultes en créant le personnage de Mickey Bolitar, héros d’«A découvert» et «A quelques secondes près»?
C’est en écrivant mon roman Sous haute tension, le dixième dont Myron Bolitar est le héros, que j’ai «rencontré» Mickey, son neveu, dont le père a disparu et la mère est sans cesse en clinique de désintoxication. Je me suis déjà dit, à l’époque, que ce garçon avait des histoires à raconter. Il est comme son oncle Myron mais en plus sombre, plus inquiet. J’ai donc essayé de raconter son histoire. Et j’ai quatre ados à la maison, âgés de 19, 16, 14 et 12 ans. Je voulais écrire des livres qu’ils aient envie de lire. On a toujours envie de conquérir de nouveaux mondes. J’écris pour la télévision, le cinéma; je suis en train d’écrire un livre d’images pour les enfants… J’aime tester de nouveaux horizons.

Les jeunes ont la réputation d’être un public difficile. Est-ce le cas?
On dit que, quel que soit notre âge, nous sommes toujours des ados de 17 ans en train d’attendre que notre vie commence. Une part de moi est toujours très adolescente, je n’ai pas eu beaucoup de peine à la réactiver. Mais, sinon, à part le fait que Mickey a 15 ou 16 ans et qu’il vit un quotidien différent de celui d’un adulte de 40 ans, peu de choses changent en écrivant pour les plus jeunes. Je n’ai pas utilisé un style plus branché, ou gentil, ou complaisant. Mes enfants me servent de documentation vivante, je les écoute parler de leurs copains, de leur vie en classe ou dans la rue.

Voulez-vous aussi encourager la lecture chez les ados?
Je ne suis pas si altruiste! De plus, je ne pense pas qu’il y ait un problème de lecture chez les jeunes. Quand j’étais enfant, je ne me souviens pas de phénomènes du type Harry Potter ou Hunger Games, avec des files de gamins attendant l’ouverture de librairies pour acheter le dernier tome. Ce que je ne voulais pas, c’est écrire un livre de vampires ou de fantasy comme il en existe tant. Je voulais introduire du suspense dans la vraie vie. Peu d’écrivains font cela. Du coup, les adultes aiment autant les livres avec Mickey que les jeunes, et de nombreux pays les publient à la fois dans une collection jeunesse et dans une collection standard…

Vous avez perdu vos parents lorsque vous aviez 20 ans. Cela a-t-il influencé votre destin d’écrivain?
J’écrivais déjà à leur décès, de toute manière. Mais il est clair que je comprends la perte de manière intime depuis leur décès. Beaucoup de scènes entre Myron et son père ou sa mère sont des scènes telles qu’elles auraient pu se produire si mes parents avaient survécu. D’ailleurs, allez savoir pourquoi, Myron habite chez ses parents jusqu’à ses presque 35 ans… La tragédie est un grand professeur.

Ecrire une catharsis alors? Une manière de vivre par procuration?
Je ne voudrais pas forcément vivre les scènes que je décris, non! Mais, parfois, mon écriture devient très sentimentale, oui, et me sert de thérapie. Tant mieux si je me fais du bien autant qu’à mes lecteurs.

«Six ans déjà». De Harlan Coben. Belfond, 350 p.

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Claudio Marinesco
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