La musique classique fait un carton à Verbier (VS). Le succès du Verbier Festival, qui débute vendredi, ne se dément pas malgré ses deux décennies d'existence. Au contraire, le festival se montre plus vivant que jamais.
La recette du succès est simple: "pousser les artistes hors de leur zone de confort", confie Martin Engstroem, directeur général et fondateur du festival, dans un entretien avec l'ats. Et ça fonctionne. Beaucoup de musiciens reviennent, année après année.
"Pour les faire revenir, j'essaie de leur donner des défis". Et le directeur général de citer l'exemple de Thomas Quasthoff, le célèbre baryton-basse allemand handicapé de naissance. Il est né sans bras et a accepté le challenge de diriger la "Passion selon Saint Matthieu" de Bach.
L'artiste a mis fin à sa carrière de chanteur en 2012 pour se consacrer à la formation. Mais il connaît bien la "Passion selon Saint Matthieu" pour l'avoir chantée une cinquantaine de fois. Qu'il prenne la baguette pour la diriger et faire ses débuts en tant que chef d'orchestre est un événement historique.
Le chef d'orchestre Valery Gergiev illustre lui aussi parfaitement la philosophie du patron du festival. Il sera à la baguette le 23 juillet, mais aussi au piano. Ce sera la première fois depuis 25 ans qu'il joue en public en plus de diriger, "c'est une marque de confiance" confie Martin Engstroem.
"Il se passe plein de choses avec ces artistes connus placés dans des situations inhabituelles". Les concerts prennent d'autres couleurs. "C'est ce qui différencie notre festival", estime M. Engstroem qui admet la difficulté à être innovant dans le monde de la musique classique.
La réaction des artistes est en général très bonne. "Nous avons 22 ans d'expérience en la matière", sourit le directeur général. Mais il concède que la philosophie ne plaît pas à tous. "Certains ne veulent pas montrer leurs faiblesses".
Car se produire au Verbier Festival c'est aussi s'exposer. "Beaucoup de collègues artistes viennent en spectateur aux concerts de leurs confrères", précise Martin Engstroem. Ceux qui se produisent le savent et cherchent à montrer leur meilleur niveau.
Et au-delà des 40'000 billets vendus à chaque édition, chaque concert est diffusé en direct et en streaming sur Internet. En moyenne, il y a 28'000 auditeurs par concert. "Tout ceci donne un aspect vivant au festival", estime le directeur général.
Et la manifestation ne se veut pas élitiste. Chaque jour, le programme propose jusqu'à 25 événements musicaux dans la station, dont quatre, en soirée, sont payants. Pas étonnant que la station dénombre 15'000 résidents durant la période du festival, "dont beaucoup viennent pour l'ambiance et n'achètent pas de billet", précise Martin Engstroem.
Le regret de l'année sera l'absence du chef d'orchestre américain James Levine. Il devait faire l'ouverture le 17 juillet, mais a dû renoncer en dernière minute en raison d'une infection auriculaire. Martin Engstroem se réjouissait d'accueillir l'artiste qui n'avait plus quitté New York depuis huit ans.
Pour agrémenter le programme, le festival propose aussi depuis plusieurs années une petite incursion dans d'autres styles musicaux. Cette intégration de musiques du monde amène un autre public. Les choix sont tributaires d'opportunités qui se présentent "et un peu de mes goûts personnels", dit le directeur.
Cette année, Martin Engstroem admet avoir eu un coup de chance. L'orchestre du Buena Vista Social Club, qui a propulsé la musique cubaine sur le devant de la scène à la fin des années 1990, fait sa tournée d'adieux. "Et la date était libre".
Le concert a lieu le 31 juillet. Et le public ne s'est pas trompé sur la qualité de la musique proposée. L'orchestre du Buena Vista Social Club jouera devant une salle comble. Tous les billets ont trouvé preneur depuis plusieurs semaines déjà. Martin Engstroem fait mouche avec sa recette.