«Dehors, étranger, dehors!» C’est ainsi que la ville de Hamelin exprime sa reconnaissance au joueur de flûte venu la libérer d’une invasion de rats. On connaît le conte allemand, popularisé par les frères Grimm.
Mis en scène pour les enfants par la compagnie Pied de Biche, il prend pourtant une couleur très contemporaine, en regard de l’actualité. Les rats finissent noyés, eux qui étaient venus attirés par l’opulente Hamelin, confite dans sa suffisance. Et les mendiants quémandant des miettes sont tués à bout portant.
Pourtant, la pièce ne convainc pas. Les rats restent des rats, comme dans la propagande nauséabonde. Pourquoi ne pas leur donner voix? On peine à être touché par les autres personnages. Les bourgeois y sont puants, qui ne pensent qu’à l’argent. Avec le dératiseur, on se dit qu’il va peut-être se passer quelque chose.
Après tout, notre flûtiste est une hybridation inquiétante entre Marilyn Manson, l’Alex d’Orange mécanique, Willy Wonka et l’un des acolytes du diable dans le roman Le maître et Marguerite de Boulgakov. Il échappe au manichéisme par son ambiguïté. Pourtant, son sort nous est également indifférent.
Et pour cause: le spectacle qui devrait raconter la capture des sens par la musique est surchargé par une bande-son d’un rock démodé. Au moment où le flûtiste se met à jouer, nos oreilles sont déjà saturées.
Ensuite, en voulant mêler le jeu des acteurs avec des marionnettes de différentes tailles (créées par Christophe Kiss), la mise en scène devient confuse. Par peur d’ennuyer, elle en fait trop.
Au matin, pour se venger de ne pas avoir été payé, le flûtiste attire les enfants de la ville à sa suite. Un banc de brouillard traverse la scène, la lune s’y découpe. Un instant de calme, vertigineux et beau, que l’on aurait aimé voir se répéter.