Rencontre. Trois ans après «Intouchables», Eric Toledano et Olivier Nakache retrouvent Omar Sy pour «Samba».
Ils défendent un nouveau film, mais à longueur d’interviews se voient questionnés sur le précédent. Forcément, quand vous avez réalisé Intouchables, troisième plus grand succès de l’histoire du cinéma français et film non anglophone le plus rémunérateur de tous les temps à l’échelle mondiale, cela vous poursuit. Eric Toledano et Olivier Nakache, qui signent avec Samba leur cinquième long métrage commun, le quatrième avec Omar Sy, s’en accommodent parfaitement, tout en relevant avoir réussi à oublier ce succès phénoménal pour se lancer dans cette nouvelle aventure.
«La seule façon que nous avions de nous libérer était d’arrêter de penser à Intouchables, explique Eric Toledano. Sinon, quand vous commencez à écrire, tout est comparaison. On a d’abord pris une décision d’ordre politique d’auteur: ne pas aller au même endroit, ne pas se réaventurer dans le même lieu, à savoir une comédie de type buddy movie. Mais nous voulions quand même rester nous-mêmes, parler d’un sujet qui nous touche et de deux extrêmes qui se rencontrent. D’où cette idée autour d’un sans-papiers et d’une fille victime d’un burn-out. A partir du moment où nous nous sommes immergés dans ce sujet-là, plus rien ne nous a rappelé Intouchables.»
Enquête de terrain
Le sans-papiers, c’est Samba, un Sénégalais qui cherche à régulariser sa situation mais va se voir signifier une obligation de quitter le territoire français. La fille, c’est Alice, une cadre qui tente de reprendre pied en travaillant comme bénévole dans une association d’aide aux migrants. Après avoir assuré durant un an et demi le service après-vente d’Intouchables, les deux réalisateurs s’isolent pour commencer à écrire. C’est alors qu’ils découvrent Samba pour la France, écrit par une romancière qui se trouve également être cinéaste, Delphine Coulin. Le livre, qu’ils décident d’adapter avec l’aide de son auteure, devient «un accélérateur», leur permet de gagner une année, disent-ils. A l’instar de ce qu’a fait Delphine Coulin, ils décident d’enquêter et rencontrent aussi bien des sans-papiers que des travailleurs sociaux, des victimes de burn-out et des médecins. «On a été très loin pour être le plus crédible possible», dit Olivier Nakache. Le duo visite également un centre de détention près de l’aéroport de Roissy et visionne des documentaires, dont Vol spécial, du Lausannois Fernand Melgar.
Discours social
«Contrairement à lui, nous ne sommes pas des réalisateurs engagés, poursuit Eric Toledano. Ce qui nous a intéressés dans son film, c’est par exemple cet homme qui chante alors qu’il se trouve en détention, cette légèreté qui peut accompagner un sujet grave. Une fois qu’on a passé la première émotion, il s’agit de vie, et dans la vie il n’y a pas qu’une couleur, il n’y a pas que le drame. On cherche toujours, dans nos films, à avoir un peu de lumière.» Olivier Nakache reprend: «On fait des films qui sont faciles d’accès, on a envie que les gens passent un bon moment. Si ensuite les spectateurs ont envie de réfléchir, nous sommes contents.» Mission réussie: l’équilibre entre drame et moments plus légers est parfait, faisant de Samba un film admirablement rythmé et, à travers le discours social qui le sous-tend, bien plus intéressant qu’Intouchables.
«Samba».
D’Eric Toledano et Olivier Nakache.
Avec Charlotte Gainsbourg et Omar Sy. France, 1 h 58. Sortie le 15 octobre.