Pour la première fois, le canton de Vaud reçoit une oeuvre en paiement d'impôts de succession. "La Fête étrange. Hommage à Alain-Fournier" est une oeuvre majeure d'Alice Bailly, décédée à Lausanne en 1938. Une fois restaurée, la toile sera exposée au futur Musée cantonal des Beaux-Arts.
Depuis 2006, une loi vaudoise permet la dation d'oeuvres d'art en paiement d'impôts sur les successions et les donations. Cet outil "fiscal et culturel", inspiré de l'expérience française, existe déjà dans les cantons de Genève et du Jura.
Sa première concrétisation en terres vaudoises concerne une oeuvre de 1925 d'Alice Bailly, peintre née à Genève en 1872 et proche des nouveaux mouvements picturaux du début du XXe siècle. Le tableau fait référence au "Grand Meaulnes", le roman d'Alain-Fournier, et dévoile une fête onirique où domine la figure d'une femme en blanc sur son cheval, symbole de la femme engagée dans les avant-gardes.
Cette huile de grand format fait partie du "top 100" du patrimoine vaudois, a expliqué devant la presse Bernard Fibicher, directeur du Musée cantonal des Beau-Arts (mcb-a).
Cette dation n'est pas une simple transaction. Elle est le résultat d'une histoire et d'une relation de confiance qui remonte à loin, a ajouté M. Fibicher. L'oeuvre provient de la collection de la famille Amsler. "Alice Bailly en avait fait don à mes grands-parents en 1937 en signe de reconnaissance", a expliqué Christine Amsler.
Ceux-ci l'avaient soutenue financièrement lors de la crise du début des années 30, période où l'artiste ne parvenait plus à vendre de tableaux.
Le canton ne dévoile pas la valeur de cette dation. Difficile aussi de savoir ce que vaut cette huile sur le marché de l'art. Selon l'expert Paul-André Jaccard, "cette oeuvre superbe est difficile à collectionner en raison de sa grande taille. Elle est hors marché".
De manière générale, avant de conclure une dation, une commission d'agrément (composée de représentants de l'Etat et d'un expert extérieur) doit examiner si le bien proposé présente une importance majeure pour le canton et en estimer la valeur. Elle recommande ensuite au Conseil d'Etat d'accepter ou non la dation. Dans le cas présent, le gouvernement a accepté "avec enthousiasme".